AVERTISSEMENT DE L'ÉDITEUR.
Ce volume, que nous intitulons Mélanges littéraires, est formé de tous les ouvrages non versifiés que leur caractère permet de placer à la suite de la série poétique. La plupart des pièces de cette collection, plaisanteries, facéties satiriques, rêves, feuilles volantes, etc., se répandirent dans le public aussitôt après leur composition, comme pièces détachées, soit manuscrites, soit imprimées; d'autres ne parvinrent qu'aux amis de l'Auteur, qui lui-même les perdit de vue, n'en ayant pas conservé de copies. Quant aux feuilles volantes, c'étaient, comme le montrent divers propos du Roi cités dans l'Avertissement du IXe volume, p. IV, les armes dont il se servait dans l'espèce de guerre littéraire qu'il faisait à ses ennemis politiques.
I. SERMON SUR LE JOUR DU JUGEMENT.
Ce Sermon, trouvé dans les papiers de M. de Catt, lecteur du Roi, est conservé aux archives royales du Cabinet (Caisse 397, D). En entier de la main du Roi, et d'une écriture serrée, il tient cinq pages et demie d'un papier petit in-4 à bordure noire, et n'est ni signé ni daté.
Cette facétie fut composée dans les semaines qui suivirent la défaite de Hochkirch et la mort de la margrave de Baireuth; le but du Roi, en se livrant à ce travail, était de se distraire de ses idées lugubres et de reprendre toute l'énergie et la sérénité de son âme.
<X>Pour mieux faire connaître la situation morale dans laquelle il se trouvait, nous transcrivons un fragment des Mémoires (manuscrits) de M. de Catt, également déposé aux archives royales du Cabinet (Caisse 397, C).
« Bataille de Hochkirch. »
« Je fus appelé vers les trois heures après midi, jour de la bataille. J'entre en tremblant, le Roi vient à moi, en me déclamant ces vers de Mithridate :II-a »
Enfin, après un an, tu me revois, Arbate, etc.
« Il récitait tout ce qui pouvait le concerner, en faisant quelques changements, comme : Daunus a saisi l'avantage, etc. ... Les uns sont morts, j'ai sauvé tout le reste. »
« Quand j'entendis qu'on me parlait en vers, je fus rassuré, et l'on causa assez tranquillement sur cette fâcheuse affaire. Il donna beaucoup de regrets à la mort du maréchal Keith, qu'il loua extrêmement pour ses grands talents militaires, ses connaissances et sa dextérité dans les affaires politiques. Il donna aussi des regrets à la mort du prince François de Brunswic. En parlant de ces deux personnes, il répandit des larmes, et il en répandit abondamment dans cette séance, en me parlant de sa sœur la margrave de Baireuth, dont il avait reçu de tristes nouvelles sur la maladie qu'elle avait depuis quelques mois. En effet, deux jours après, il apprit la nouvelle de la mort de cette princesse. Jamais je ne vis tant d'affliction : volets fermés, un peu de jour éclairant, sa chambre, des lectures sérieuses : Bossuet, Oraisons funèbres, Fléchier, Mascaron, un volume de Young, qu'il me demanda, etc. »
De Catt dit ailleurs :II-b « Pendant le quartier d'hiver de Breslau, où le Roi continuait ces lectures sombres, je lui dis un jour : Votre Majesté veut-elle donner dans la dévotion? Il ne répondit rien, et quelques jours après il me dit : Vous avez été surpris de mes lectures; voici ce qu'elles ont produit. Et il me donna un Sermon sur le jugement dernier, écrit sur du papier de deuil, et l'Éloge de Matthieu Regnaud, maître cordonnier, qui a été imprimé. »
C'est ainsi qu'en donnant un aliment à la gaîté naturelle de son esprit, le Roi surmonta sa tristesse, et put reprendre son activité or<XI>dinaire. Il doit avoir composé un autre ouvrage du même genre à son quartier général de Grimma, le 4 septembre 1757. C'est le Sermon prononcé un jour devant M. l'abbé de Prades par son aumônier ordinaire, le philosophe de l'incrédulité; mais ce titre est tout ce que nous en savons. Voyez Militärischer Nachlass des Preussischen General-Lieutenants Victor Amadeus Grafen Henckel von Donnersmarck, herausgegeben von Karl Zabeler. Zerbst, 1846, t. I, partie II, p. 289.
II. ÉLOGE DE LA PARESSE. Dédié au marquis d'Argens.
L'Auteur envoya cet écrit à d'Alembert le 4 août 1768. Nous n'en connaissons qu'un seul exemplaire imprimé (15 pages in-8), celui qui fut donné par le Roi à sa sœur la princesse Amélie, et qui appartient actuellement au gymnase de Joachim, à Berlin.
Déjà dans son Épître à d'Argens, du mois de mai 1747 (t. XI, p. 50), Frédéric disait, en invitant, son ami à venir à Sans-Souci :
Mais, indolent marquis, tandis que je vous fais
De cette saison ravissante,
Par mes crayons, quelques portraits,
La paresse, qui vous enchante,
L'œil chargé de pavots, engourdie et pesante,
Sous ses lois vous captive enfin.
Voyez aussi, t. XIII, p. 55-58, l'Épître au lit du marquis d'Argens, du 7 février 1754.
III. FACÉTIE A M. DE VOLTAIRE. RÊVE.
Cette Facétie, inconnue jusqu'ici, fut envoyée par Frédéric à Voltalre et à d'Alembert, le 12 décembre 1770. La réponse de d'Alembert est datée du 3 janvier 1771; celle de Voltaire, du 11. L'exemplaire qui a appartenu à celui-ci fait partie de la collection du comte de Suchtelen; au bas du titre se lisent ces mots de la main de Voltaire : Reçue le 31 décembre 1770.
IV. RÊVE.
Cette pièce fut envoyée par l'Auteur à Voltaire le 9 juillet, et à d'Alembert le 13 août 1777. La réponse de Voltaire, où il cite la <XII>fin du morceau, est datée du mois d'août de la même année, et celle de d'Alembert, du 22 septembre. C'est aussi de la collection du comte de Suchtelen que nous avons tiré cette facétie, encore inédite.
Outre ces deux Rêves, il existe un Songe en vers de Frédéric, adressé à Vol-taire, et faisant partie d'une lettre datée du 20 février 1750; c'est pour cette raison qu'il est placé dans la Correspondance; mais il se trouve aussi dans les Œuvres du Philosophe de Sans-Souci. Au donjon du château. Avec privilége d'Apollon, 1750, t. III, p. 223-227. Voyez t. XI, p. 172-175.
V. COMMENTAIRES APOSTOLIQUES ET THÉOLOGIQUES SUR LES SAINTES PROPHÉTIES DE L'AUTEUR SACRÉ DE BARBE-BLEUE. Imprimé à Cologne chez Pierre Marteau (1779).
C'est sous ce titre que Frédéric fit imprimer, en grand secret et sous le voile de l'anonyme, un livre qui contient 1o, p. 3-14, un Avant-propos de l'évêque du Puy; 2o, p. 15-28, La Barbe-bleue, conte (extrait textuellement des Contes de ma mère l'Oie); et 3o, p. 29-60, le Commentaire théologique de Dom Calmet sur Barbe-bleue. L'ouvrage sortait de l'imprimerie royale de G.-J. Decker, à Berlin. La première et la troisième de ces pièces, composées toutes deux par le Roi, attribuent le Commentaire à Dom Calmet, abbé de Sénones, mort en 1757, et auteur d'un Commentaire littéral sur tous les livres de l'Ancien et du Nouveau Testament.
Frédéric ne fit tirer de son livre qu'un très-petit nombre d'exemplaires destinés uniquement à ses amis. Le 7 octobre 1779, il en envoya un à d'Alembert, et lui écrivit en même temps : « Ce Commentaire est fait selon les principes de Huet, de Calmet, de Labadie et de tant d'autres songe-creux dont l'imagination égarée leur a fait trouver dans de certains livres ce qui n'y a jamais été. » D'Alembert, dans sa réponse du 19 novembre, dit, entre autres, en parlant du Commentaire : « Votre Majesté devrait bien, par charité chrétienne et surtout apostolique, en envoyer un exemplaire à cet évêque du Puy qu'elle a fait si bien parler. L'adresse de ce savant et éloquent prélat n'est plus au Puy, mais à Vienne en Dauphiné, dont on l'a fait archevêque. » Vers la fin du mois de février 1780, d'Alembert reçut encore six exemplaires de l'ouvrage du Roi, qu'il distribua, à ce qu'il <XIII>dit dans sa réponse du 29 février, « à des hommes dignes de recevoir ce présent et d'en sentir le prix. »
Nous donnons une exacte réimpression de l'édition originale des Commentaires, livre très-rare, d'après l'exemplaire qu'en possède M. Rodolphe Decker, imprimeur du Roi.
M. Thiébault a commis une erreur en parlant, dans ses Souvenirs de vingt ans de séjour à Berlin, 4e édition, t. I, p. 116-118, et t. V, p. 346 et 347, d'un Commentaire sacré sur le conte de Peau-d'âne; il voulait sans doute parler du Commentaire sur Barbe-bleue, car Frédéric n'a jamais composé d'autre Commentaire sacré que celui-ci. Malgré cette confusion de noms, l'article des Souvenirs est si intéressant, que nous ne pouvons nous dispenser d'en citer le commencement. « C'était pour le Roi, dit M. Thiébault, un véritable amusement que de copier le style des écrivains inspirés, ascétiques ou mystiques. Il se faisait alors un point capital de bien placer les termes consacrés à ce genre d'ouvrages, et de citer des passages tirés tant des livres saints que des auteurs les plus révérés. Il voulait, dans ces occasions, que ses phrases fussent harmonieuses par la forme, imposantes par le ton de dignité qu'il leur donnait, et stériles pour le fond. »
Les ouvrages que Frédéric a composés dans le style des écrivains sacrés sont : le Sermon sur le jour du jugement; les deux Rêves; le Panégyrique du sieur Jacques-Matthieu Reinhart, maître cordonnier; le Bref de S. S. le pape à M. le maréchal Daun; le Mandement de Monseigneur l'évêque d'Aix; la Lettre du pape Clément XIV au mufti Osman Mola; et enfin le Commentaire sacré sur Barbe-bleue.
VI. LETTRE D'UN ACADÉMICIEN DE BERLIN A UN ACADÉMICIEN DE PARIS.
Lors de la fameuse querelle littéraire du professeur König avec Maupertuis, Voltaire prit parti contre ce dernier pour son ami König, en écrivant, le 18 septembre 1752, sa Réponse d'un académicien de Berlin à un académicien de Paris.VI-a Frédéric, blessé de la conduite que Voltaire avait tenue dans cette affaire, fit imprimer sa Lettre d'un académicien de Berlin à un académicien de Paris, que Voltaire envoya à madame Denis le 15 octobre 1752. « Voici qui n'a point d'exemple, lui écrit-il, et qui ne sera pas imité; voici qui est unique. <XIV>Le roi de Prusse, sans avoir lu un mot de la réponse de König, sans écouter, sans consulter personne, vient d'écrire, vient de faire imprimer une brochure contre König, contre moi, contre tous ceux qui ont voulu justifier l'innocence de ce professeur si cruellement condamné. Il traite tous ses partisans d'envieux, de sots, de malhonnêtes gens. La voici, cette brochure singulière, et c'est un roi qui l'a faite! »
Nous imprimons la Lettre d'un académicien de Berlin d'après l'édition originale qui en a paru à Berlin, chez Étienne de Bourdeaux, libraire du Roi et de la cour, 1753, vingt-quatre pages in-8. Il en existe une seconde édition sous le même titre, qui a aussi paru à Berlin, chez Étienne de Bourdeaux, en 1753; mais celle-ci qui n'a que vingt-deux pages in-12, a un autre fleuron de titre que la première. Dans cette seconde édition on a omis, à dessein, à ce qu'il paraît, vers la fin du second alinéa, p. 5, les mots : « dont il disait avoir oublié où il avait vu les originaux. » Voyez ci-dessous, p. 62, ligne 4 et 5.
VII. LETTRES AU PUBLIC.
Voltaire écrivait de Berlin à madame Denis, le 15 mars 1753 : « Voici les deux Lettres au public. Le Roi a écrit et imprimé ces brochures, et tout Berlin dit que c'est pour faire voir qu'il peut très-bien écrire sans mon petit secours, etc. » - Il dit au duc de Richelieu, dans sa lettre de Potsdam, 20 mars 1753 : « Il en paraît aujourd'hui une troisième » (Lettre au public).
Ces trois opuscules parurent séparément, à Berlin, chez Étienne de Bourdeaux, libraire du Roi et de la cour, 1753. Ils ont chacun seize pages, et portent sur le titre l'aigle tenant le sceptre et le glaive. Nous reproduisons exactement le texte de ces éditions originales.
Nous avons suivi, pour l'orthographe des noms de Rinonchetti et de Zopenbrug, l'édition originale de la troisième Lettre au public. Cependant il existe aux archives royales du Cabinet (Caisse 365, L) une feuille sur laquelle se trouve la minute autographe d'une lettre de Frédéric à Voltaire (1753). On lit, au revers de ce papier, ces mots, également de la main du Roi : « Lettre du comte Rinochetti, premier sénateur de la république de Santo-Martino, au baron Sopenbruc, ministre de Sa Majesté Prussienne. - Monsieur, nous avons appris <XV>avec autant de surprise que d'indignation qu'un mauvais plaisant anonyme tourne notre république en ridicule, et que cette brochure scandaleuse s'est imprimée dans la capitale du Roi votre maître. »
G.-E. Lessing, qui publia, en avril 1753, une traduction allemande de ces lettres, imprime de même Rinochetti. Le 29 mai, il écrivit de Berlin à son père, en allemand : « Le Roi est l'auteur des trois Lettres au public; il les a écrites en français, et je les ai traduites. C'est une satire, sans qu'on sache proprement sur quoi elle roule. Elles ont fait beaucoup de bruit, et donné lieu à différentes suppositions, parce qu'elles ont le Roi pour auteur. »
VIII. LETTRE DU CARDINAL DE RICHELIEU AU ROI DE PRUSSE. Des champs Élysées, le 15 octobre 1756.
Le premier brouillon de cette pièce, écrit de la main du Roi et assez imparfait, est conservé aux archives royales du Cabinet (Caisse 397, D). Il est remarquable que ce manuscrit, qui n'a pas de date, soit intitulé, Lettre du cardinal de Mazarin au roi de Prusse, et qu'il soit signé Armand du Plessis, cardinal duc de Richelieu. Sans nous arrêter à cet autographe, nous reproduisons exactement l'édition originale, imprimée en 3 pages in-8, que nous avons également trouvée aux archives du Cabinet, avec le manuscrit ci-dessus mentionné. Nous nous sommes borné à rétablir les épithètes cruelle et sanguinaire ajoutées au mot aristocratie, et adoucies par le marquis d'Argens, qui y avait substitué le mot tumultueuse. Voyez la lettre du marquis d'Argens au Roi, du 17 octobre 1756, et, ci-dessous, p. 87, ligne 11 et 12.
IX. LETTRE DE LA MARQUISE DE POMPADOUR A LA REINE DE HONGRIE.
Nous avons trouvé un exemplaire de l'édition originale de cette pièce aux archives du Cabinet (Caisse 397, D). Il a deux pages grand in-4. A la page 2, M. de Catt a mis en note « Au camp de Schönfeld, septembre 1758. » Frédéric établit en effet son quartier général à Schönfeld, le 13 septembre 1758; il fit le 15 une excursion à Gamig, et, de retour à Schönfeld le 16, il y resta jusqu'au 25.
<XVI>Notre texte est une réimpression fidèle de l'édition originale. La leçon qui se trouve dans le Supplément aux Œuvres posthumes de Frédéric II, t. III, p. 241 à 246, porte en tête de la pièce la date inexacte de 1759. La seule variante qu'on remarque dans le texte même est une correction des éditeurs de Berlin.
L'Auteur fait mention de cette facétie dans sa lettre au marquis d'Argens datée de Landeshut, 12 mai 1759.
X. LETTRE D'UN SECRÉTAIRE DU COMTE KAUNITZ A UN SECRÉTAIRE DU COMTE COBENZL. Traduit de l'allemand.
Les héritiers de feu madame la comtesse d'Itzenplitz possèdent l'autographe de cette pièce, auquel correspond l'édition originale en quatre pages in-8, conservée aux archives royales du Cabinet (Caisse 397, D), et intitulée : Lettre d'un secrétaire du comte Kaunitz. à un secrétaire du comte Cobenzl. Traduit de l'allemand. A la fin de la pièce se trouvent les mots : A Liége, chez Bassompierre, libraire. 1758. Nous reproduisons exactement le texte de cette édition. La leçon que présente le Supplément, t. III, p. 232-238, est quelque peu corrigée. L'Auteur fait également mention de cette facétie dans la lettre au marquis d'Argens dont il a été parlé à la fin de l'article précédent.
XI. PANÉGYRIQUE DU SIEUR JACQUES-MATTHIEU REINHART, MAITRE CORDONNIER, PRONONCÉ LE TREIZIÈME MOIS DE L'AN 2899, DANS LA VILLE DE L'IMAGINATION, PAR PIERRE MORTIER, DIACRE DE LA CATHEDRALE. AVEC PERMISSION DE MONSEIGNEUR L'ARCHEVÊQUE DE BONSENS.
M. de Catt, lecteur du Roi, lui écrit de Breslau, le 21 janvier 1759 : « Voilà l'oraison funèbre; elle n'annonce pas des forces défaillantes. Tout y intéresse; la fin a fait sur moi une impression vive que n'a point produite celle de Bossuet. Le dirai-je? elle m'a attendri. » Il parle aussi de cet ouvrage dans ses Mémoires (manuscrits), à la date du 12 avril 1759 : « Sa Majesté, dit-il, dans le quartier d'hiver, composa l'oraison funèbre de Matthieu Reinhart, maître cordonnier; elle avait lu à Dresde les Oraisons de Fléchier et de Bossuet. C'est pour s'essayer dans ce genre et pour se moquer des oraisons funèbres qu'elle fit celle du cordonnier. »
<XVII>La première édition du Panégyrique (A Berlin, chez Haude et Spener), 1759, a vingt-quatre pages in-4. La même année, il en parut aussi une édition petit in-8, et l'année suivante une édition in-12. On en fit une contrefaçon en France, en 1759.
Voltaire parle de cette facétie dans sa lettre à Frédéric, du 22 mars 1759, et le marquis d'Argens dans celle qu'il lui écrivit le 27 mai 1760.
Frédéric écrit à d'Alembert, le 13 janvier 1782 : « J'ai fait dans ma jeunesse le panégyrique d'un cordonnier que je trouvai le moyen d'élever presque au niveau de cet empereur que Pline célébra si magnifiquement. » Luigi Diodati dit, à la page 9 de sa Vie de l'abbé Galiani, publiée à Naples en 1788, que Frédéric avait imité, dans son panégyrique du sieur Reinhart, l'Oraison funèbre du bourreau de Naples, par Galiani. L'abbé Ferdinand Galiani, conseiller du roi de Naples et auteur des Dialogues sur le commerce des blés (1770), composa en 1749, sur la mort du bourreau de Naples, un petit volume formé de pièces très-sérieuses de ton, qu'il attribuait à divers académiciens, afin de les tourner en ridicule en imitant leur manière et leur style.
A défaut de l'édition originale, nous reproduisons le texte du Supplément aux Œuvres posthumes, t. III, p. 251-292, après l'avoir collationné avec une autre édition de cette facétie, 1759, vingt-quatre pages petit in-4, édition où manquent, dans le titre, les mots : Avec permission de Mgr l'archevêque de Bonsens, ainsi que l'Approbation. Les variantes placées sous notre texte sont tirées de cette édition spéciale.
XII. LETTRE D'UN OFFICIER PRUSSIEN A UN DE SES AMIS, A BERLIN.
On conserve aux archives royales du Cabinet (Caisse 397, D) un exemplaire de l'édition originale de cette feuille volante, d'un peu plus de trois pages in-8, sans indication de lieu ni d'année. Le royal Auteur a corrigé de sa propre main, à la seconde page, ligne 7, une faute d'impression, en ajoutant les mots « l'effet que feront de là, » qui manquaient entre « jugez de » et « leurs, » et qu'on retrouve dans le Supplément aux Œuvres posthumes, t. III, p. 304, ligne 8; ce qui fait voir que les éditeurs de ce recueil ont tiré parti de l'exem<XVIII>plaire corrigé par l'Auteur. Quant à la date 1760, ajoutée au haut de la lettre, p. 303, elle ne se trouve pas dans l'édition originale.
XIII. BREF DE S. S. LE PAPE A M. LE MARÉCHAL DAUN, etc.
Frédéric dit, dans son Histoire de la guerre de sept ans (Œuvres, t. IV, p. 254), en parlant du pape Clément XIII : « Ses premiers pas, dès son avénement au pontificat, furent de fausses démarches; il envoya au maréchal Daun une toque et une épée bénites, pour avoir battu les Prussiens à Hochkirch, etc. »
C'est à ce fait que la pièce dont il s'agit ici doit son origine. L'Auteur envoya son Bref du pape au marquis d'Argens, le 13 mai 1759, avec une lettre qui commence ainsi : « Vous avez commandé, mon cher marquis, et j'ai obéi tout de suite. Vous recevez ici deux pièces pour votre Mercure de Harbourg; l'une est un Bref du pape au maréchal Daun, capable de faire frémir ceux qui ont encore quelque penchant pour Martin Luther; l'autre est une Lettre du prince de Soubise à ce maréchal sur cette épée, qui m'a paru la rendre assez ridicule. » Voici ce que le marquis d'Argens répondit le 17 mai : « Le Bref du pape m'a paru si plaisant, que je le traduirai en latin, et je le ferai imprimer en deux colonnes, le latin d'un côté et le français de l'autre, ce qui lui donnera encore un plus grand air de vraisemblance, parce que tous les brefs du pape sont toujours en latin lorsqu'ils sont adressés à la cour impériale ou aux ministres de cette cour. » Le marquis d'Argens écrivit en effet, au Roi, le 18 juin 1759 : « J'ai l'honneur d'envoyer à Votre Majesté le Bref du pape avec la traduction latine. »
Cette édition originale du Bref est très-rare, et nous n'en avons jamais vu d'exemplaire. Notre copie de l'original français de Frédéric est tirée de l'ouvrage intitulé : Maria Theresia und ihre Zeit, von Eduard Duller. Wiesbaden, 1844, petit in-8, t. II, p. 85 et 86.
Les éditions contemporaines, en latin et en allemand, que nous connaissons de cette feuille volante, en sont des traductions tout à fait fidèles, et forment le témoignage le plus sûr de l'authenticité de l'original français reproduit ici.
<XIX>XIV. LETTRE DE FÉLICITATION DU PRINCE DE SOUBISE AU MARÉCHAL DAUN, SUR L'ÉPÉE QU'IL A REÇUE DU PAPE.
On conserve aux archives royales du Cabinet (Caisse 397, D) le manuscrit de cette pièce, copiée par de Catt et signée par le Roi. M. de Catt a ajouté la date : Landeshut, 13 mai 1759. Le texte du Supplément aux Œuvres posthumes, t. III, p. 239, est conforme à ce manuscrit, à trois fautes d'impression près.
Frédéric envoya cette Lettre de félicitation au marquis d'Argens, du quartier général de Landeshut, le 13 mai 1759, comme nous l'avons rapporté dans l'article précédent.
XV. LETTRE DU MARÉCHAL LÉOPOLD COMTE DE DAUN AU PAPE.
Il existe aux archives royales du Cabinet (Caisse 397, D), parmi les papiers laissés par M. de Catt, un exemplaire de l'édition originale de cette pièce, en quatre pages petit in-8. Elle est datée de Bruxelles, 8 juillet 1759. Nous en donnons ici une réimpression exacte, qui ne diffère que très-peu du texte du Supplément aux Œuvres posthumes de Frédéric II, t. III, p. 247-250.
XVI. PIÈCE BADINE AVANT LA BATAILLE DE KAY.
Cette pièce, de la main du Roi et en deux pages in-4, sans titre ni date, se trouvait parmi les manuscrits de Frédéric laissés par M. de Catt. (Voyez J.-D.-E. Preuss, Friedrich der Grosse als Schriftsteller, p. 320.) Ce manuscrit original, et la copie faite par de Catt et corrigée par l'Auteur, sont conservés aux archives royales du Cabinet (Caisse 397, D).
M. de Catt a ajouté à sa copie les mots suivants : « La bataille de Kay ayant été perdue (le 23 juillet 1759) par le général Wedell,XII-a Sa Majesté me dit : A présent ne publions pas ceci. Il ne s'agit plus de rire. »
Nous donnons cette pièce pour la première fois, et d'après la copie corrigée par l'Auteur. Nous y ajoutons seulement le titre qu'elle porte dans la liste de M. de Catt.
<XX>XVII. LETTRE (DE L'INCONNU) A M. LE MARÉCHAL DUC DE BELLE-ISLE, A L'OCCASION DE LA SIENNE, DU 23 JUILLET 1759, A M. LE MARECHAL DE CONTADES.
Le maréchal duc de Belle-Isle, ministre de la guerre, avait écrit au maréchal de Contades, dans une lettre datée du 23 juillet 1759 : « La guerre ne doit pas être prolongée, et peut-être faudra-t-il, suivant les événements qui arriveront d'ici à la fin de septembre, faire un véritable désert en avant de la ligne des quartiers que l'on jugera à propos de tenir pendant l'hiver. »
Cette lettre, interceptée le 5 août, près de Detmold, fut publiée en français et en allemand, entre autres par les Berlinische Nachrichten von Staats- und gelehrten Sachen, 4 septembre 1759, no 106, p. 439; et ce fut alors que parut la Lettre (de l'Inconnu) à M. le maréchal duc de Belle-Isle, etc., qui porte la date : A Londres, ce 21 d'août 1759.
Il se trouve un exemplaire imprimé de cette feuille volante (quatre pages in-4, sans indication de lieu) dans la correspondance manuscrite du duc Ferdinand de Brunswic avec son secrétaire Philippe Westphalen, conservée au grand état-major de l'armée, à Berlin (Aus dem Archive des Herzogs Ferdinand von Braunschweig. Vol. 325. September 1759).
Le duc Ferdinand écrivait à son secrétaire, en lui envoyant cette pièce : « Je crois que le Roi en est l'auteur; que vous en paraît-il? » Celui-ci répondit le 26 septembre 1759 : « Monseigneur, je découvre aussi quelque chose, dans cette lettre, qui paraît être le style du Roi. J'ai marqué un passage auquel je prie V. A. S. de faire attention; c'est un passage susceptible d'un double sens, mais qui me paraît être un reproche fait au maréchal, qu'il recevait d'autre part de quoi embellir son jardin. »
C'est en grande partie sur cette autorité que nous avons admis cette facétie, mais, à vrai dire, sous la même réserve que la Lettre d'un aumônier de l'armée autrichienne, car nous n'avons pu en trouver ni l'autographe, ni aucune copie vérifiée; d'ailleurs, la correspondance du Roi ne contient pas un mot qui puisse constater l'authenticité de la Lettre à M. le maréchal duc de Belle-Isle.
Le marquis d'Argens parle avec indignation dans ses lettres au Roi, du 9 et du 29 septembre 1759, et du 20 octobre suivant, de l'affreux projet de renouveler dans le pays de Hanovre les horreurs <XXI>du Palatinat, et de faire de cet électorat un désert avant le mois de septembre; ce qui aurait pu faire supposer qu'il était l'auteur de la Lettre de l'Inconnu. Mais lorsqu'il fut instruit de ce projet par les gazettes, la facétie était déjà imprimée; d'ailleurs, le style ainsi que tout le caractère de cette pièce nous a toujours paru si frappant, que nous l'avons de tout temps attribuée au Roi, et que nous en avons donné, en 1838, une copie dans notre ouvrage : Friedrich der Grosse als Schriftsteller. Ergänzungsheft, p. 104-108.
Le 21 août 1759, date de la Lettre au maréchal duc de Belle-Isle, Frédéric était à son quartier général de Fürstenwalde. Selon sa lettre au marquis d'Argens, de la même date, ce fut le premier jour exempt d'inquiétude qu'il passa depuis la bataille de Kunersdorf; car il avait reçu la nouvelle positive que l'ennemi se retranchait près de Francfort, ce qui montrait assez qu'il ne voulait rien entreprendre contre les Prussiens.
La copie de la pièce qui nous occupe a été faite sur l'exemplaire de l'édition originale ci-dessus mentionné, le seul que nous connaissions.
XVIII ET XIX. LETTRE D'UN SUISSE A UN NOBLE VÉNITIEN ET LETTRE D'UN SUISSE A UN GÉNOIS.
L'Épître de Frédéric au marquis d'Argens, en lui envoyant les Lettres de Phihihu, mars 1760, commence ainsi :
Marquis, je vais sur vos brisées;
Tantôt Suisse, tantôt Chinois, etc.;
et pour expliquer le sens du mot Suisse du second vers, l'Auteur a mis sous le texte la note suivante : « Il avait paru des Lettres d'un Suisse, dans lesquelles le Roi développait la politique de la cour de Vienne. » (Voyez t. XII, p. 166.) Ces Lettres d'un Suisse sont précisément les pièces nos XVIII et XIX.
Ne trouvant ni manuscrit, ni édition originale de la Lettre d'un Suisse à un noble vénitien, nous nous voyons réduit à en tirer le texte du Supplément aux Œuvres posthumes de Frédéric II, t. III, p. 293-302, qui porte la date A Genève 1760. Mais comme les éditeurs du Supplément ont ajouté assez arbitrairement des dates à la <XXII>Lettre de la marquise de Pompadour à la reine de Hongrie, à la Lettre d'un officier prussien à un de ses amis, à Berlin, et à la Lettre de félicitation du prince de Soubise au maréchal Daun, nous nous croyons autorisé à suspecter la date de 1760 mise par eux à la Lettre d'un Suisse à un noble vénitien, et nous pensons que c'est de cette pièce qu'il est parlé dans le post-scriptum suivant, que le Roi a ajouté à sa lettre inédite au marquis d'Argens, Landeshut, 12 mai 1759 : « Vous pourrez trouver à Berlin le Panégyrique de Matthieu Renard, Lettres sur les satires et sur les libelles, Lettre d'un secrétaire du comte Kaunitz au secrétaire du comte Cobenzl, Lettre d'un professeur suisse à un Vénitien, Lettre de la Pompadour à la Reine pour demander l'abolition du collége de chasteté. »
L'authenticité de la Lettre d'un Suisse à un Génois est spécialement attestée par l'Auteur dans le passage suivant de sa lettre au marquis d'Argens, du 19 février 1760 : « J'ai fait une brochure pour m'amuser, où je compare nos gens au triumvirat d'Octave, Lépide et Antoine. Vous jugez bien que les proscriptions n'y sont pas oubliées, non plus que la fin de l'histoire, où le plus fin engloutit les autres. » Ce passage donne la clef de l'épigramme contenue dans cette pièce, dont la fin entre dans des détails fort piquants. Nous n'avons pas trouvé d'autographe de la Lettre d'un Suisse à un Génois, ni même de copie corrigée par le Roi. Le seul exemplaire original imprimé que nous en connaissions, et c'est celui que nous suivons, se trouve à la Bibliothèque royale de Berlin, quatre pages in-8, sans lieu d'impression, ni date.
XX. RELATION DE PHIHIHU, ÉMISSAIRE DE L'EMPEREUR DE LA CHINE EN EUROPE. Traduit du chinois.
Le Roi écrit à la duchesse de Saxe-Gotha, le 5 mars 1760, en lui envoyant cet ouvrage : « Je prends la liberté de vous envoyer une petite brochure sur les affaires du temps; c'est l'aboiement d'un épagneul pendant qu'un gros tonnerre gronde, lequel empêche de l'entendre; cependant il faut de temps en temps réveiller le public de sa léthargie, et l'obliger à faire des réflexions. Ces semences ne produisent pas d'abord; quelquefois elles portent des fruits avec le temps. »
<XXIII>Le marquis d'Argens fait l'éloge de la Relation de Phihihu dans sa lettre au Roi, du 17 avril 1760. Voyez la Correspondance entre Frédéric II et le marquis d'Argens, t. I, p. 152, 172, 175, 249, 250, et, dans notre édition des Œuvres de Frédéric, t. XII, p. 166, l'Épître au marquis d'Argens, en lui envoyant les Lettres de Phihihu.
Notre texte est une exacte reproduction de l'édition originale de cette pièce, qui parut sous le titre de : Relation de Phihihu, émissaire de l'empereur de la Chine en Europe. Traduit du chinois. A Cologne, chez Pierre Marteau, 1760, vingt-quatre pages in-8. Il existe un exemplaire de cette édition à la Bibliothèque royale de Berlin.
XXI. LETTRE D'UN OFFICIER AUTRICHIEN A UN DE SES AMIS, EN SUISSE.
L'autographe de cette pièce, inédite et sans date, fait partie de la collection du comte de Suchtelen. Nous pensons qu'elle a été composée vers l'an 1760.
XXII. LETTRE D'UN AUMONIER DE L'ARMÉE AUTRICHIENNE AU RÉVÉREND PÈRE SUPÉRIEUR DES CORDELIERS DU COUVENT DE FRANCFORT-SUR-LE-MAIN.
Parmi les facéties authentiques contenues dans le Supplément aux Œuvres posthumes de Frédéric II. Cologne, 1789, t. III, on trouve, p. 332-347, une pièce intitulée : Lettre d'un aumônier de l'armée autrichienne au révérend père supérieur des cordeliers du couvent de Francfort-sur-le-Main, dans laquelle on découvre les astuces et les moyens criminels dont s'est servi le roi de Prusse pour gagner les batailles de Liegnitz et de Torgau. 1760. Nous n'avons pu en découvrir ni l'autographe, ni même une copie vérifiée, et il n'en est fait mention nulle part dans la correspondance de Frédéric. En revanche, cet opuscule a été attribué au marquis d'Argens par plusieurs contemporains, qui ont mis son nom sur le titre de leurs exemplaires, tant de l'original français que de la traduction allemande. Les catalogues de la Bibliothèque royale de Berlin et de plusieurs bi<XXIV>bliothèques particulières désignent également M. d'Argens comme l'auteur de cette facétie. A la vérité, il y a quelques raisons de penser que la Lettre d'un aumônier n'est pas du Roi. Elle s'écarte, sur certains points, de la manière de Frédéric, pour se rapprocher de celle du marquis d'Argens. Ainsi on y trouve la sentence d'Horace modifiée : Non sunt miscenda sacra profanis, qui se lit aussi dans la lettre du marquis d'Argens à Frédéric, du 9 mars 1763. Il y est parlé du père Malagrida et des autres jésuites assassins des rois, qui figurent déjà dans sa lettre du 20 avril 1759. On y remarque enfin, comme dans les autres ouvrages du marquis, un certain étalage d'érudition hostile aux papes. D'un autre côté, l'examen le plus attentif du style de la Lettre d'un aumônier ne nous y a pas fait découvrir des différences assez sensibles pour qu'il nous soit possible de déclarer positivement que Frédéric n'en est pas l'auteur. Nous trouvons, d'ailleurs, dans la pièce des choses que nous serions tenté de n'attribuer qu'au Roi, p. e. l'allusion à la toque et à l'épée bénites dont le pape avait décoré le feld-maréchal comte de Daun, plaisanterie que Frédéric répète souvent dans ses poésies, dans ses feuilles volantes,XVI-a et dans ses lettres à Voltaire et au marquis d'Argens.
Nous demeurons donc, en ce qui nous concerne, dans le doute sur l'authenticité de ce morceau, et n'osant ni le rejeter absolument, ni l'admettre sans réserve, nous l'imprimons avec les autres facéties. En tous cas, cette Lettre est intéressante, fût-elle même l'ouvrage de M. d'Argens, puisqu'on sait que cet ami du Roi prit une part active à la guerre de plume que le monarque faisait aux ennemis de la Prusse dans les moments les plus critiques de la guerre de sept ans.
Notre texte est tiré de l'édition originale imprimée en 1760, en seize pages in-8, et portant le même titre que celui du Supplément, que nous avons indiqué au commencement de cet article. La Bibliothèque royale de Berlin possède deux exemplaires de cette édition.
<XXV>XXIII. MANDEMENT DE MONSEIGNEUR L'ÉVÊQUE D'AIX, PORTANT CONDAMNATION CONTRE LES OUVRAGES IMPIES DU NOMMÉ MARQUIS D'ARGENS, ET CONCLUANT A SA PROSCRIPTION DU ROYAUME.
La copie originale de cette facétie, qui a dix pages in-4, est conservée aux archives royales du Cabinet (Caisse 397, D). Elle est écrite avec beaucoup de soin, et on y remarque quatre corrections de la main du Roi : p. 5 du manuscrit (Supplément, t. III, p. 351), il a rayé le mot dangereux et mis au-dessus désastreux; p. 7 (Supplément, t. III, p. 353), il a substitué fit tomber à attira; p. 8 (Supplément, t. III, p. 354), il a mis murs au lieu de mers; et enfin, p. 8 (Supplément, t. III, p. 354), il a remplacé l'infidèle par l'impur.
On lit, au verso de la première feuille de ce manuscrit, la note suivante de la main de M. de Catt : « Dans la crainte que le pauvre marquis d'Argens ne fût la victime de cette plaisanterie, je fis mettre évêque d'Aix au lieu d'archevêque, pour qu'on s'aperçût d'abord que ce n'était pas une chose réelle; cela fit en effet sensation, et mon idée fut remplie. »
Cet opuscule, qui porte la date : Donné à Aix, en notre palais épiscopal, le 15 mars 1766, paraît être une imitation du Mandement du révérendissime père en Dieu, Alexis, archevêque de Novogorod la Grande, par Voltaire (octobre 1765). Voyez ses Œuvres, édit. Beuchot, t. XLII, p. 127-138. Le Roi, en écrivant son Mandement, voulait obliger le marquis d'Argens à quitter Aix en Provence, sa ville natale, où il était retourné en septembre 1764, et à revenir auprès de lui.
Le marquis d'Argens arriva en effet à Potsdam au mois d'avril 1766, mais il prit cette plaisanterie en mauvaise part, et y riposta par son Dialogue entre un capucin et un officier espagnol, imprimé dans la Vie de Frédéric II. A Strasbourg, 1789, t. VI, p. 287-292.
Notre texte du Mandement reproduit fidèlement le manuscrit ci-dessus mentionné.
<XXVI>XXIV. LETTRE DE M. NICOLINI A M. FRANCOULONI, PROCURATEUR DE SAINT-MARC, ET LETTRE DU PAPE Clément XIV AU MUFTI OSMAN MOLA.
Ces facéties parurent sous le titre de : Lettre de M. Nicolini à M. Francouloni, procurateur de St. Marc. Traduit de l'italien. Cologne, 1771; Lettre du pape Clément XIV au mufti Osman Mola. Traduit du latin. Cologne, 1771; en tout quatorze pages grand in-8. L'Auteur envoya cet opuscule à d'Alembert, en lui écrivant, le 7 mai 1771 : « Nous avons vu passer ici Alexis Orloff, le Lacédémonien, qui a fait la guerre dans le Péloponnèse et sur la Méditerranée; il m'a donné une pièce assez curieuse qu'il a recueillie à Venise; je souhaite qu'elle contribue à votre édification et à celle du troupeau. » D'Alembert adressa au Roi, le 14 juin, une lettre de remercîments où il dit entre autres : « Les philosophes qui aiment à rire, et ce ne sont pas les moins philosophes, doivent être très-obligés à l'abbé Nicolini de leur avoir procuré le bref édifiant du vicaire de Dieu en terre au pontife de son envoyé Mahomet. »
Notre texte est une exacte reproduction de l'édition originale de ces deux pièces, dont il se trouve un exemplaire à la Bibliothèque royale de Berlin.
XXV. DÉDICACE DE LA VIE D'APOLLONIUS DE TYANE, PAR PHILOSTRATE, A Clément XIV.
G.-J. Decker, imprimeur du Roi, publia à Berlin, en 1774, la Vie d'Apollonius de Tyane par Philostrate; avec les commentaires donnés en anglais par Charles Blount sur les deux premiers livres de cet ouvrage; le tout traduit en français; 4 volumes grand in-12. Frédéric, ayant fait traduire en français l'ouvrage anglais par le professeur Jean Salvemini de Castillon, y ajouta lui-même la Dédicace à Clément XIV. La Vie et la Dédicace eurent à essuyer une critique sévère de la part du célèbre géographe Büsching. Ce savant en parle aussi dans son livre intitulé Character Friedrichs des Zweiten, Königs von Preussen, seconde édition, Halle, 1788, in-8, p. 39, en <XXVII>ces termes : « La Dédicace au pape Clément XIV, qui précède la Vie d'Apollonius de Tyane, et sur laquelle j'ai fait quelques observations dans mes Nouvelles hebdomadaires (Wöchentliche Nachrichten, 6 mars 1775, p. 76), peut être rangée parmi les petits écrits de Frédéric. »
La date de la composition peut être à peu près fixée par une lettre que M. Jean-André Kuntze, homme d'affaires de M. G.-J. Decker écrivit le 16 juillet 1774 à son chef, alors à Bâle, et dans laquelle il lui annonce que le Roi fera lui-même la préface de la Vie d'Apollonius. Cependant ce ne fut pas une préface que Frédéric écrivit, mais la Dédicace à Clément XIV. Ce pape mourut le 22 septembre 1774.
Notre texte de la Dédicace est une exacte copie de celui qui se trouve en tête du premier volume de la Vie a'Apollonius de Tyane.
Le Roi a profité, pour les faits d'histoire littéraire qu'il cite dans cet ouvrage, de l'article Apollonius de Tyane, du Dictionnaire de Bayle.
XXVI. PROPHÉTIE.
Cette pièce se trouve dans les Œuvres posthumes, t. VIII, p. 212, parmi les lettres de l'Auteur à M. Jordan, et nous présumons qu'il l'avait envoyée à ce dernier, avec la lettre datée de Herrendorf, le 27 décembre 1740, en marchant sur Breslau, où il fit son entrée le 3 janvier 1741. Le titre de Prophétie, omis dans l'édition française des Œuvres posthumes, a été conservé dans la traduction allemande de ce recueil, seconde édition, t. VII, p. 205.
XXVII. LISTE DES NOUVEAUX LIVRES
QUI SONT SOUS PRESSE ET QUI VONT SE DÉBITER A BRESLAU CE 3 DE JANVIER 1741.
Cette facétie se trouve dans les Œuvres posthumes, t. VIII, p. 157; elle est adressée à Jordan; peut-être était-elle accompagnée de la lettre datée de Neu-markt, le 30 décembre 1740. Le commencement de la pièce indique le 3 janvier comme le jour fixé pour l'entrée du Roi à Breslau. Voyez t. II, p. 68.
<XXVIII>XXVIII. CONGÉ EXPÉDIÉ AU BARON DE PÖLLNITZ, A SA RETRAITE DE BERLIN.
Cette pièce a été imprimée pour la première fois dans les Gesammelte kleine Schriften de M. de Loen, 4e édition, 1753, t. I, p. 214, et elle a été reproduite dans la Vie de Frédéric II (par de la Veaux). A Strasbourg, 1788, t. IV, p. 209. Mais ce texte diffère entièrement du texte authentique qui nous a été fourni par les archives royales du Cabinet (Caisse 145, E); c'est ce dernier que nous reproduisons. Il en existe deux exemplaires manuscrits : l'un est de la main de M. Eichel, conseiller de Cabinet; l'autre en est une copie corrigée par l'ordre exprès du Roi, et d'après laquelle le Congé fut expédié par la chancellerie.
Nous croyons devoir transcrire ici la lettre suivante, écrite en allemand par M. Eichel au comte de Podewils, ministre des affaires étrangères :
« Par ordre de Sa Majesté le Roi, je dois envoyer ci-inclus à Son Excellence M. le comte de Podewils, ministre d'État et de Cabinet, la minute du congé du baron de Pöllnitz, et annoncer en même temps que Sa Majesté désire que Votre Excellence fasse copier avec soin cet écrit sur une grande feuille de parchemin, revêtue du sceau de Sa Majesté qui sert pour les documents publics; puis, lorsque Son Excellence M. le ministre d'État comte de GotterXXI-a l'aura contre-signé, vous l'enverrez à la signature de Sa Majesté, en y joignant la minute ci-dessus mentionnée. »
« Potsdam, le 5 avril 1744. Eichel. »
Le baron de Pöllnitz avait demandé son congé le 3 mars 1744, dans le dessein de se retirer dans un couvent, à cause d'un mariage manqué; mais il changea de résolution, et revint à Berlin dès le mois d'août. Voyez Urkundenbuch zu der Lebensgeschichte Friedrichs des Grossen, publié par J.-D.-E. Preuss, t. V, p. 240 et 241.
<XXIX>XXIX. ÉLÉGIE DE LA VILLE DE BERLIN, ADRESSÉE AU BARON DE PÖLLNITZ.
Cette facétie n'est que la suite de la précédente, et a probablement été composée vers le même temps, c'est-à-dire au commencement du mois d'avril 1744.
Ainsi que le Congé, l'Élégie se trouve dans les Œuvres posthumes, t. VIII, p. 214, parmi les lettres du Roi à Jordan; mais nous avons suivi le manuscrit original plus complet qui est aux archives royales du Cabinet (F. 96, E); on y conserve aussi, joint à la correspondance du Roi avec le baron de Pöllnitz, l'ordre suivant de la main de l'Auteur même : « Dieses mit dem Berlinischen Stadt-Siegel zu besiegeln und dem Baron von Pöllnitz Hochwohlgeboren mit zubehöriger Adresse zu überschicken. Fch. »
XXX. PORTRAIT DE M. DE VOLTAIRE.
Ce Portrait parut pour la première fois, traduit en anglais, dans The Gentleman's Magazine for June 1756, p. 267. On lisait au-dessous du titre : Character of M. de Voltaire, by a royal pen, avec la note suivante : « The following satyrical description and character of the celebrated M. de Voltaire was transmitted to us by an ingenious correspondant of the Royal Academy of Sciences at Berlin, and is said to have been written by a great P-ce. »
Le texte français ne fut publié qu'en 1788; il avait sans doute été communiqué par Darget fils aux éditeurs bâlois des Œuvres posthumes de Frédéric le Grand, roi de Prusse, qui l'y ont inséré, t. III, p. 425 et 426.
« Ce Portrait, dit Formey, en le reproduisant, est incontestablement fait par le Roi, et caractérise Voltaire de manière à ne s'y pas méprendre.XXII-a »
Le Roi s'est borné dans cet opuscule à varier un Portrait de Voltaire fait en 1735, et publié entre autres dans les Amusements littéraires, ou Correspondance politique, historique, philosophique, critique et galante, par M. de la Barre de Beaumarchais. A la Haye, chez Jean van Duren, 1740, in-8, t. I, p. 259-262.
<XXX>Il est fait mention plusieurs fois du portrait original dans la correspondance de Voltaire. Le 12 juin 1735, il écrit à Thieriot : « Qu'est-ce que c'est qu'un portrait de moi en quatre pages, qui a couru? Quel est le barbouilleur? Envoyez-moi cette enseigne à bière. » Il lui écrit quelques jours plus tard : « Je vous remercie du barbouillage que vous m'avez envoyé sous le nom de mon portrait. » Le 4 août 1735, il écrit à M. Berger : « J'ai vu le portrait qu'on a fait de moi. Il n'est pas, je crois, ressemblant. J'ai beaucoup plus de défauts qu'on ne m'en reproche dans cet ouvrage, et je n'ai pas les talents qu'on m'y attribue; mais je suis bien certain que je ne mérite point les reproches d'insensibilité et d'avarice que l'on me fait. » Enfin, il écrit à Thieriot, au mois d'août 1735 : « Tout le monde attribue le portrait au jeune comte de Charost. J'ai bien de la peine à croire qu'un jeune seigneur qui ne m'a jamais vu ait pu faire cette satire; mais le nom de M. de Charost, qu'on met à la tête de ce petit écrit, me confirme dans le soupçon où j'étais que l'ouvrage est d'un jeune abbé de la Mare, qui doit entrer auprès de M. de Charost. C'est un jeune poëte fort vif et peu sage. Je lui ai fait tous les plaisirs qui ont dépendu de moi; je l'ai reçu de mon mieux, et j'avais même chargé Demoulin de lui donner des secours essentiels. Si c'est lui qui m'a déchiré, il doit être au rang des gens de lettres ingrats. »
Nous donnons le Portrait fait par le Roi, tel qu'il se trouve dans les Œuvres posthumes, édition de Bâle.
XXXI. LETTRE DU ROI, AU NOM D'UNE JOLIE GRISETTE, AU COMTE DE SCHWERIN, COLONEL DES GENDARMES, EN LUI ENVOYANT UN MAGOT DE PORCE LAINE QUI ÉTAIT UNE CARICATURE DU COMTE.
Le colonel Frédéric-Albert comte de Schwerin, dont il a été question dans les Poésies éparses, t. XIV, p. X et XI, eut, à ce que raconte M. de Catt dans ses Mémoires (manuscrits), une intrigue galante à Nossen, pendant les quartiers d'hiver. Cette histoire vint aux oreilles du Roi, qui fit faire la caricature du comte sous la forme d'un petit magot de porcelaine; puis il écrivit la facétie qui nous occupe, et la fit copier par une femme. Il envoya enfin le tout au colonel, le 30 avril 1761.
<XXXI>Cette Lettre a déjà été publiée par de la Veaux dans sa Vie de Frédéric II. A Strasbourg, 1788, t. VI, p. 310. Notre texte est la reproduction d'une copie qui en a été faite par M. de Catt, et qui est conservée aux archives royales du Cabinet (Caisse 397, D).
XXXII. ARTICLE DE GAZETTE. 1743.
Le Roi, ayant fait renvoyer M. Poitier, maître de ballets à l'Opéra, mit un article à ce sujet dans les trois journaux de Berlin. Nous en avons trouvé l'original, en français, dans la Gazette de Berlin du jeudi 22 août 1743. Frédéric en parle dans sa lettre à Jordan, du 20 août, et le 24, il écrit au même : « Je te prie, fais mettre l'article de Poitier dans la gazette de Paris et de Londres. »
XXXIII. ARTICLE DE GAZETTE. 1767.
En 1767, on parlait beaucoup de guerre à Berlin. Pour détourner l'attention publique et lui donner le change, le Roi écrivit cette facétie, qu'il fit expédier, le 1er mars 1767, par son conseiller de Cabinet Galster au professeur Formey, pour que celui-ci l'insérât dans la Gazette de Berlin. C'est dans les papiers de Formey qu'on a retrouvé cet Article de gazette, écrit en français par le Roi, et copié par Galster, tel que ce dernier l'avait expédié. La traduction de cette pièce se trouve dans les deux journaux allemands du 5 mars 1767; Joseph Du Fresne de Francheville la publia en français dans la Gazette littéraire de Berlin, le lundi 9 mars, feuille CLIV, p. 74 et 75. Cette impression est conforme à notre texte, que nous devons à l'obligeance de M. Varnhagen d'Ense, et sous lequel nous avons noté deux corrections que M. de Francheville avait faites.
Berlin, ce 20 mars 1850.
J.-D.-E. Preuss,
Historiographe de Brandebourg.
II-a Mithridate, tragédie de Racine, acte II, scène III.
II-b Voyez la Vie de Frédéric II, roi de Prusse (par de la Veaux). A Strasbourg, 1789, t. VI, p. 380.
VI-a Œuvres de Voltaire, édit. Beuchot, t. LVI, p. 181-183.
XII-a Voyez t. V, p. 15 et 16.
XVI-a Voyez t. XII, p. 130, 132, 134, 188, et ci-dessous, les pièces no XIII, XIV, XV et XX.
XXI-a Grand maréchal de la cour du Roi. Voyez t. X, p. 113.
XXII-a Souvenirs d'un citoyen. A Berlin, 1789, t. I, p. 327.