36. AU MÊME.
Remusberg, 30 septembre 1739.
Mon cher Camas,
Je ne vous envie point votre bonheur, mon cher ami; ne croyez point que je sois encore intentionné de venir vous supplanter dans votre faveur. Demeurez, à la garde de Dieu, sur le pied où vous êtes; j'admirerai vos mérites, sans cependant sentir la force de les imiter. Il règne trop de brouillards dans la région où vous habitez, dont je crains que les exhalaisons ne me soient préjudiciables. Permettez-moi de humer modestement et dans ma solitude un petit air de liberté qui me fait prospérer. Mais trêve de badinage; je souhaite de tout mon cœur que la goutte et la mauvaise humeur quittent tout à fait vos régions, et que vous passiez la saison tranquillement et avec toute la satisfaction que vous désirez vous-même. Adieu, mon cher Camas; je suis avec toute la tendresse imaginable
Votre très-fidèle ami,
Federic.
37. AU MÊME.
Ruppin, 15 novembre 1739.
Mon cher Camas,
Je vous félicite de votre heureux retour dans votre garnison, et je ne vous trouve aucunement à plaindre dans votre solitude. Une aimable femme, de bons livres et de la bonne chère sont toutes des choses qui ne rendent aucun ermite malheureux; au contraire, c'est peut-être la quintessence de la vie, et ce qu'il y a de plus raisonnable à faire dans ce monde. Si vous appelez cela s'ennuyer, je m'ennuierai volontiers avec vous toute ma vie. Nous nous préparons ici à remonter sur le grand théâtre de la capitale, et à profiter des plaisirs dont vous faites la description vraie et