<274>obscures et confuses, mais encore tout à fait inintelligibles. Il me semble que j'acquiers tous les jours plus de lumières avec lui, et que, à chaque proposition que j'étudie, il me tombe une nouvelle écaille de dessus les yeux. C'est un livre que tout le monde devrait lire, afin d'apprendre à raisonner et à suivre le fil ou la liaison des idées dans la recherche de la vérité.
Nous avons un temps abominable ici. Il semble que le salpêtre et le soufre aient conspiré notre perte. Le tonnerre gronde tous les jours, et la foudre est si redoutable en ce pays, que l'on entend tous les jours parler des dégâts qu'elle a faits. Voilà ce qu'il y a de plus nouveau ici, et, à moins que de vous circonstancier tous les différents malheurs qui arrivent en ces contrées, je serais fort embarrassé de quoi vous entretenir. Adieu, mon cher; croyez-moi avec une bien sincère estime,
Mon cher Suhm,
Votre très-fidèlement affectionné ami,
Frederic.
23. DE M. DE SUHM.
Dresde, 6 août 1736.
Monseigneur
La très-gracieuse lettre dont Votre Altesse Royale m'a honoré, et par laquelle elle me marquait son départ pour la Prusse, m'ayant fait suspendre l'envoi des cahiers de ma traduction, j'ai profité de cet intervalle pour parcourir ce pays, afin de renouveler quelques anciennes connaissances. Qu'il est triste, monseigneur, à un certain âge, d'être réduit à chercher un établissement! Mais notre philosophe m'apprenant que tout ce qui arrive a sa raison suffisante, et que je ne dois être surpris de rien, je me résigne, en prenant le meilleur parti qui me reste à prendre, c'est-à-dire, de me conduire de façon à n'avoir jamais rien à me reprocher. J'ai connu un grand joueur de trictrac qui, après les