<300>les généreuses bontés qu'elle a eues jusqu'ici pour moi, et qui seules sont capables de soutenir encore ma fermeté, mon courage et ma constance dans la douloureuse résolution que j'ai prise, qui seules sont capables de me conserver encore à la vie par l'espérance, quoique fort éloignée, d'en jouir un jour plus parfaitement que le ciel n'a voulu me le permettre jusqu'à présent.

C'est avec un serrement de cœur inexprimable que je viens d'écrire cette lettre. J'attends, monseigneur, de votre amitié toutes les consolations dont j'ai besoin dans les circonstances où je me trouve, me sentant incapable d'en puiser en moi-même. Oh! que ne puis-je ici vous dévoiler ce qui se passe dans mon âme! Vous me dispenseriez pour toujours de vous réitérer l'assurance des sentiments ineffables d'amour et de reconnaissance avec lesquels je serai jusqu'au tombeau, etc.

38. A M. DE SUHM.

Remusberg, 25 novembre 1736.



Mon cher Diaphane,

La lettre que vous venez de m'écrire a fait sur moi un effet tout différent de celui que vos autres lettres ont coutume de produire. J'ai été véritablement affligé de vous voir vous éloigner de moi à une si énorme distance. Comme je m'imagine que c'est pour votre satisfac-tion et pour votre établissement que l'on vous charge de la commission d'envoyé extraordinaire pour la Russie, je me consolerais en quelque façon de la perte que je fais de vous, pour l'amour de vous-même, si une pensée affreuse ne venait s'offrir à mon esprit, pensée qui redouble ma tristesse, et me rend plus inquiet sur votre sort que jamais. C'est, mon cher Diaphane, le contraste de la délicatesse de votre constitution avec la rigueur du climat de Moscovie. Votre santé n'y résistera pas, et je redoute pour vous le sort du pauvre Rabutin.a Permettez-moi de


a Le comte de Rabutin, mort à Saint-Pétersbourg, envoyé de France.