<322>et si désirable de la bruyante nouvelle de la prise d'Oczakow, vers l'embouchure du Dnieper. Le feld-maréchal Lacy marche déjà vers la Crimée, et le feld-maréchal comte de Münnich va se mettre en mouvement avec le gros de l'armée pour s'approcher du Danube.
Je ne m'étonne pas que j'oublie mes infortunes quand j'ai le bonheur d'entretenir V. A. R. J'allais effectivement finir cette lettre sans lui faire la relation d'un malheur qui m'est arrivé, et qui a menacé ma vie. Je loge dans une maison que le baron de Mardefeld a quittée pour prendre celle qu'avait le comte de Lynar, Il m'avait assuré qu'il avait pourvu à tout contre le feu; mais malheureusement on avait oublié une cheminée dont il ne se servait guère. Le feu y a pris samedi passé, et avait déjà gagné la chambre au-dessus de la mienne, avant qu'on s'en aperçût. Si c'eût été de nuit, je devenais assurément la proie des flammes, et ma maison avec toutes les voisines, et même le magnifique palais impérial, qui n'en est pas fort éloigné, auraient facilement pu être réduits en cendres. Mais comme c'était en plein jour, on y a promptement porté secours, et le feu fut éteint en moins d'un quart d'heure. J'en ai été quitte pour la peur et quelques meubles qui ont été endommagés.
Si je remercie le ciel de m'avoir conservé la vie, ce n'est qu'autant qu'il lui a plu, par cette grâce, de me laisser l'espérance de la consacrer un jour au service du plus digne et du plus aimable prince, ce n'est qu'autant qu'il veut bien m'en réserver la félicité dans ses décrets éternels. Après une telle assurance, que pourrait-il, monseigneur, me rester à vous dire des sentiments inaltérables de tendresse et de vénération avec lesquels je serai jusqu'à mon dernier soupir, etc.