2. DE ROLLIN.
9 février 1737.
Monseigneur
Les termes me manquent pour témoigner à Votre Altesse Royale la vive reconnaissance dont m'a pénétré l'honneur qu'elle m'a fait de se souvenir de moi et de me prévenir d'une manière si noble et si obligeante. Ce que vous avez ordonné qu'on me déclarât de votre part, monseigneur, au sujet de mes ouvrages, est le té<232>moignage le plus flatteur que je pusse désirer. Le comble des vœux d'un auteur est de se voir estimé et loué par un prince d'un goût si délicat, et qui écrit dans une langue étrangère avec tant d'élégance, de justesse et de dignité. C'est pourtant, monseigneur, ce qui me touche le moins dans ce qu'il vous a plu d'écrire à mon sujet. La bonté et l'effusion de cœur avec laquelle V. A. R. s'exprime, et un vif amour du bien public qui paraît animer tous ses sentiments, me remplissent d'une bien plus juste admiration, parce que ce sont là les grandes vertus d'un prince. Tout ce que je dois craindre, c'est que ce bon cœur et cet amour du bien public ne vous aient aveuglé en ma faveur. Mais, quand cela serait ainsi, je me donnerais bien de garde de songer à vous tirer d'erreur. J'ai trop d'intérêt à conserver une estime qui m'est si glorieuse. J'ose dire, monseigneur, que je la mérite, non par mes ouvrages, mais par la respectueuse reconnaissance et la profonde vénération avec lesquelles j'ai l'honneur d'être,
Monseigneur
de Votre Altesse Royale
le très-humble et très-obéissant serviteur,
C. Rollin.