92. DU MÊME.
Breslau, 21 octobre 1741.
Sire,
On dit que le prince Léopold est devant Neisse, et que la garnison ne saurait tenir longtemps; qu'elle abandonnera bientôt la place aux troupes de V. M.
On assure ici positivement que Neipperg a eu l'honneur de s'entretenir avec V. M. à deux reprises.159-a Tout cela fait soupçonner la paix prochaine.
Ce qu'il y a de particulier, c'est qu'on a reçu ici des lettres de Venise dans lesquelles on marque que V. M. y est attendue cet hiver. Cette nouvelle m'a fait plaisir, parce qu'elle a réveillé en <145>moi l'espérance que j'ai toujours eue de voir l'Italie. On dit que Cataneo confirme ce bruit.
La bourgeoisie se prépare à faire des illuminations; il paraît même qu'elle a beaucoup d'empressement à se distinguer sur ce sujet.
Il est arrivé ici une aventure assez singulière. Le libraire Korn, revenu de Leipzig, veut aller rendre visite à M. Blochmann, dont toute la bourgeoisie est charmée. Au lieu d'aller chez ce premier, qu'il n'a jamais vu, il entre chez M. Vockel, conseiller saxon, qu'il croit le directeur de la ville. Les compliments faits, ce dernier lui demande des nouvelles de Leipzig. Korn, qui croit parler à M. Blochmann, lui dit qu'on était fort mécontent en Saxe, qu'on ne payait personne, qu'on y persécutait les luthériens, et mille autres choses semblables. M. Vockel ne pouvait comprendre la raison de ce discours. Enfin, cette comédie se termina au moment que le libraire demanda des choses relatives aux fonctions du directeur, et le libraire s'aperçut de sa bévue.
J'ai l'honneur d'être, etc.
159-a Voyez t. II, p. 101.