191. A M. JORDAN.
Federicus Jordano, salut. J'ai reçu votre lettre avec bien du plaisir, et j'ai vu que votre santé n'est ni si bonne ni si sûre que je le désire. Tu feras, mon enfant, ce que tu trouveras à propos pour ta santé, et tu iras dans la contrée de la terre la plus propre pour la rétablir.
Je vous mande que j'ai fait des vers, mais que je les veux corriger avant que de vous les envoyer. Vous vous attendiez peut-être à recevoir des nouvelles d'un genre tout différent; mais voilà comme est fait le monde, il s'y passe souvent le contraire de ce que l'on imagine. Faites mes compliments à l'aimable témoin goutteux et au perfide Duhan : dites à l'un et à l'autre que je les aime bien.
Je suis ici parmi toutes les contre-gardes, enveloppes, ravelins et avant-fossés de l'univers. J'ai beaucoup d'occupations, de soucis et d'inquiétudes; mais je ne me plaindrai de rien, pourvu que je puisse bien servir la patrie, et lui être aussi utile que j'en ai la volonté.
Adieu, cher Jordan; je vous souhaite tous les biens imaginables, et principalement la santé, sans laquelle il ne nous est pas possible de prendre part à quoi que ce soit. Aimez-moi toujours, et n'oubliez pas les amis absents.