<118>de plaisir dans le théâtre de Berlin. Comme j'ai publié, il y a quelques années, maintes réflexions là-dessus, l'on a souhaité que je visse le plan qu'ils se proposaient de suivre. L'infant Don Philippe m'a fait inviter, et j'ai passé quelques jours à la cour de Parme. J'ai été extrêmement flatté d'y paraître comme le serviteur le plus attaché au plus grand prince, qui voit l'Europe réunie pour le combattre et l'admirer. J'ai bien entendu, Sire, le nom prussien célébré par des bouches françaises. L'admiration que l'on a pour V. M. est égale à la façon dont vous avez su vaincre et traiter les vaincus; elle est égale à ces hauts faits en tout genre qui seront à jamais la leçon des siècles à venir. Je suis bien assuré, Sire, que V. M. va, de cette campagne, casser l'arrêt qui semblait l'avoir condamné, comme dit V. M., à guerroyer toujours. Ce que vous avez fait exécuter, Sire, pendant l'hiver, est un bon garant de ce que V. M. fera pendant l'été. Elle va couronner de la façon la plus décisive et la plus glorieuse ses nobles et longs travaux. Je prends la liberté, Sire, d'envoyer à V. M. quelques boutargues pour ses entremets de campagne, et suis avec le plus profond respect, etc.
122. AU COMTE ALGAROTTI.
Rohnstock, 28 mars 1759.
Si l'arrêt doit être cassé, ce sera un bien pour tout le monde; il n'y a certainement point de plaisir à guerroyer toujours. Vos opéras valent mieux que les tragédies sanglantes qu'on joue ici; mais peut-être seront-ils changés en des scènes lugubres, et votre pays, qui a été si souvent l'objet de l'ambition de tant de princes, deviendra le théâtre de spectacles moins riants que ceux de vos comédies. Je vous remercie de vos boutargues, que je recevrai avec plaisir. Sur ce, je prie Dieu qu'il vous ait en sa sainte et digne garde.