<155>mettre le grand neveu. Son amour est aussi froid que toute sa personne; mais que vous importe? Tâchez, ma bonne maman, à mettre le nez à l'air. Le grand air est la souveraine médecine; il vous remettra du baume dans le sang, et vous guérira tout à fait. Pour moi, je m'y intéresse sincèrement. Vous connaissez mon vieux cœur, qui est toujours le même, et qui est fait pour vous aimer tant qu'il existera. Adieu, ma bonne maman; ayez bien soin de vous remettre, et ne m'oubliez pas.
24. A LA MÊME.
(Juillet 1764.)
Je montrerai votre lettre, ma bonne maman, à ma sœur, qui sera charmée de ce que vous pensez à elle. Je regrette, à la vérité, de ne point jouir ici de votre présence; mais je trouve que vous avez grande raison de vous ménager, et, dans le fond, je pourrais fort peu profiter ici de votre aimable compagnie, car nous sommes comme dans une diète générale du Saint-Empire romain, environnés de trente princes et princesses; et d'ailleurs mes infirmités m'empêchent d'assister à tous les banquets. Je me trouve aux grandes solennités, et je tâche de prendre quelque repos entre deux. Le vieux barona insulte à mes jambes estropiées; il a couru avec le prince Frédéric à qui se devancera. Pour moi, qui me traîne à cloche-pied, à peu près comme une tortue, je vois la rapidité de leur course ainsi qu'un paralytique qui assisterait à un ballet de Denis.
Bonsoir, ma bonne maman; j'espère de vous revoir quand mes jambes me reviendront, et que je pourrai grimper les escaliers du château qui mènent à votre paradis. Je suis à jamais le plus ancien de vos adorateurs,
Federic.
a Le baron de Pöllnitz. Voyez t. XI. p. 12, et t. XIII, p. 18.