<189>sibles. Pour moi, qui n'en crois rien, et qui sens malheureusement beaucoup de maux, je pourrais lui faire la réponse de ce stoïcien auquel un péripatéticien niait le mouvement : le stoïcien le confondit en marchant devant lui.b Les faits portent avec eux un caractère d'évidence auquel la subtilité des sophismes est forcée de céder.

Mais en voilà bien assez sur une matière si abstraite. Soyez persuadée, madame, que je compte pour le plus heureux hasard de ma vie celui qui m'a guidé si bizarrement à votre cour. Le bonheur de ma vie n'a duré qu'un moment. Je me flatte que, si je vois la fin de cette guerre, je pourrai jouir de la même faveur avec moins d'interruption. Ce sont les vœux et l'espérance de celui qui sera à jamais,



Madame,

de Votre Altesse
le très-fidèle cousin et serviteur,
Federic.

22. A LA MÊME.

Neustadt (près de Meissen), 22 novembre 1760.



Madame,

Après que ma vie errante m'a promené depuis près de six mois de province en province, ce m'est, madame, une véritable consolation de recevoir de vos nouvelles et d'apprendre par vous-même la part que vous daignez prendre à quelques succès qui ont accompagné nos entreprises. Il est sûr que la guerre présente se distingue de toutes les autres par un certain acharnement opiniâtre et atroce qui caractérise l'esprit de nos politiques modernes. Cette campagne a été pour moi la plus cruelle de toutes. Il n'y a pas eu moyen de déloger l'ennemi de son poste avantageux auprès de


b Voyez Diogène Laërce, liv. VI, chap. 2, §. 41, où Diogène le cynique, pour toute réponse à des arguments contre le mouvement, se met à marcher.