<90>de Padoue, élève harmonieux du cygne de Mantoue; j'espère de vous revoir ici au mois d'octobre, en dépit de la Faculté et de vos assassins.
86. AU MÊME.
(Octobre 1753.)
Vous ne trouverez pas étrange, mon cher Algarotti, que je me sépare de la confrérie des poëtes, depuis qu'il se trouve de si grands faquins parmi eux. J'ai fait les poésies que je vous ai données, pour m'amuser. Cela n'était bon que pour cet objet; mais je ne veux ni être lu, ni être transcrit. Raphaël doit être copié, Phidias imité, Virgile lu. Pour moi, je dois être ignoré. Il en est de mes ouvrages comme de la musique des dilettanti. On doit se rendre justice, et ne pas sortir de sa sphère. Je connais la mienne, qui est assez étroite, et je me ressouviens de la Sallé, qui, après avoir plu à Londres, fut sifflée depuis qu'elle s'avisa de danser habillée en homme. Je souhaite que l'Italie vous ennuie au point de vous la faire quitter bientôt. Vous voyez que les médecins de Padoue ont le sort de tous les autres de l'Europe. Si vos opéras sont mauvais, vous en trouverez ici un nouveau qui peut-être ne les surpassera pas. C'est Montézuma. J'ai choisi ce sujet, et je l'accommode à présent. Vous sentez bien que j'intéresserai pour Montézuma, que Cortès sera le tyran, et que par conséquent on pourra lâcher, en musique même, quelque lardon contre la barbarie de la R. Cr. Mais j'oublie que vous êtes dans un pays d'inquisition; je vous en fais mes excuses, et j'espère de vous revoir bientôt dans un pays hérétique où l'opéra même peut servir à réformer les mœurs et à détruire les superstitions.