126. DU MÊME.
Bologne, 1er décembre 1760.
Sire,
Les brouillards autrichiens se sont bientôt dissipés. La vérité a percé, et nous avons su que V. M., après les marches les plus rapides et les plus savantes manœuvres, a remporté près de Torgau la plus glorieuse victoire et la plus féconde en conséquences. Vincere et victoria uti scis. Après avoir si bien battu Loudon, il ne restait à V. M. que de défaire le maréchal Daun, qui mandait avoir remporté une victoire complète, tandis que la bataille n'était pas encore finie. Vos ennemis sont défaits ou muets. Terra siluit in conspectu ejus.137-c
Je ne doute pas que V. M. ne reçoive celle-ci dans Dresde, et je doute fort que M. de Broglie veuille attendre une harangue de vos grenadiers dans l'université de Göttingen. Ainsi ce héros qui a réveillé les Anglais par la victoire de Rossbach les tranquillisera sur Hanovre par celle de Torgau.
J'ai appris avec douleur que vos ennemis, Sire, qui ne peuvent pas battre vos troupes, s'en vengent sur vos statues. Mais j'ai frémi en lisant qu'un coup de feu avait .......138-a Puisse le Dieu des armées conserver toujours une vie si nécessaire à la gloire de l'humanité et au bien de l'univers!
137-c Voyez ci-dessus, p. 119.
138-a Frédéric dit dans sa lettre au marquis d'Argens, du 5 novembre 1760, en parlant de la bataille de Torgau : « J'ai eu un coup de feu qui m'a labouré le haut de la poitrine; mais ce n'est qu'une contusion, un peu de douleur sans danger. »