<251>expédition secrète ne le sera pas autant que celle de l'année passée, qui devait se faire approchant dans le même temps, et dont personne n'a jamais rien appris. V. M. saura mieux que moi plusieurs petits avantages que le prince Ferdinand et le prince votre neveu remportent tous les jours; ainsi je ne lui en parlerai pas.
M. Joyard,b votre maître d'hôtel, ne sachant comment s'adresser à V. M., est venu chez moi me prier de lui marquer qu'il avait encore quelques biens à Lyon, qu'il voudrait aller prendre pour les joindre à ceux qu'il a ici de l'héritage de Pesne, son beau-père. C'est un congé de six mois qu'il lui faudrait pour terminer entièrement ses affaires, et, comme il trouve à la foire de Leipzig des occasions favorables pour son voyage, il aurait une obligation infinie à V. M., si elle daignait lui en accorder la permission. V. M. le connaît depuis près de vingt-huit ans, et elle sait bien qu'il n'est pas capable de prolonger d'un jour son voyage au delà du temps que V. M. voudra bien lui accorder.
Vous savez sans doute, Sire, que l'on a défendu aux jésuites en France d'avoir des écoliers, et qu'il leur est interdit de recevoir aucun novice; cela fait beaucoup de bruit. C'est ainsi que les Grecs, dans la décadence de l'empire d'Orient, disputaient sur des questions théologiques dans le temps qu'on leur enlevait l'Égypte et l'Arménie. J'ai l'honneur, etc.
190. AU MARQUIS D'ARGENS.
1761.
Je n'ai point trouvé Bayle parmi mes livres; on l'a oublié à Breslau. Ayez donc la bonté, mon cher marquis, de me prêter les Comètes, ou mon âme meurt d'inanition. C'est à vous, comme à un philosophe, de me donner cette substance spirituelle qui nous guérit des préjugés, et devient un aliment indispensable au salut de notre raison et du bon sens.
b Voyez t. X, p. 114, et t. XIII, p. 98.