262. AU MÊME.b
Jägerndorf, août 1762 (Péterswaldau, 19 août 1762).
Eh bien, voilà ces postillons;
Vous les voulez, je les envoie.
Puissent-ils de nos camps et de nos pavillons
Reconduire chez vous le plaisir et la joie,
La vive et saillante gaîté,
Compagne de votre bel âge!
Puisse le récit non flatté
D'un assez léger avantage
Rétablir la sérénité,
Le calme et la tranquillité
Dans votre âme abattue après un long orage!
Ces rapides courriers n'annoncent pas la fin
D'un pénible et vigoureux siége;
Mais vous apprendrez d'eux par quel coup le destin.
Dans certain combat clandestin,
Nous a su garantir du piége
Que l'implacable Autrichien
Nous tendait en mauvais chrétien.
Vraiment, ce n'était pas la peine
Qu'avec tant d'appareil le peuple en fût instruit;
Jamais ni Condé ni Turenne
Pour si petits exploits ne firent si grand bruit.
Le politique, d'une âme hautaine,
Vous soutiendra qu'on est réduit
A nourrir d'espérance vaine
Le public aveuglé, fait pour être séduit.
A ... ainsi ... le mène
Du Canada jusqu'en Ukraine;
Qui sait le tromper le conduit.
Pour moi, qui n'ai jamais reçu cet Évangile.
Je ne prétends point par l'erreur
Abuser lâchement, en scélérat habile,
La confiance et la candeur
D'un peuple frivole et facile.
Ah! fasse d'un ciron qui veut un éléphant,
J'aime la vérité, le vrai seul est charmant.
Je ne veux point de bruit, de pompe solennelle,
b Cette lettre se trouve aussi au t. XII, p. 255-257.