<51>Dauphiné. Il me serait de la plus grande utilité d'avoir la compagnie d'un officier français jusqu'en Suisse, et surtout d'un parent et d'un ami. J'ose ajouter à ces premières raisons que toute ma famille, et ma mère surtout, dont j'attends la plus grande partie de ce que je dois avoir, me saura un gré infini de ce congé. Ainsi, Sire, si vous m'accordez cette grâce, après m'avoir vous-même accablé de bienfaits, vous me procurerez de nouveaux biens dans ma patrie, et vous me ferez terminer aisément les discussions que je serai peut-être obligé d'essuyer. Pardonnez-moi, Sire, si je vous écris aussi longuement dans le temps que vous êtes occupé des affaires les plus sérieuses; mais je connais l'excès de vos bontés, et vous ne sauriez croire le bien que vous me ferez, si vous m'accordez la grâce que je prends la liberté de vous demander. J'ai l'honneur, etc.
44. AU MARQUIS D'ARGENS.
Littau, 7 mai 1758.
Vous connaissez le chien de tendre que j'ai pour vous, mon cher marquis, et vous savez que je ne saurais rien vous refuser. Prenez donc pour votre conducteur ce capitaine de Piémont, votre parent; je lui ferai expédier le passe-port que vous me demandez, et vous pourrez partir avec lui lorsque vous le trouverez à propos.a Nous courons ici les grandes aventures; j'ai fait trotter M. Daun de Bohême en Moravie;b enfin nous guerroierons jusqu'à ce que nos maudits ennemis veuillent faire la paix. Votre lettre, mon cher, avait une odeur de casse et de séné qui m'a fait purger en l'ouvrant. Grand Dieu! ne faites donc pas une apothicairerie de votre pauvre corps. Quoi! une lettre qui fait soixante milles d'Allemagne conserve, par votre seul tact, assez de vertu médicinale pour opérer, après huit jours de route, sur
a Voyez t. XII, p. 98.
b Voyez t. IV, p. 218 et 220.