<78>j'ai entendu faire quelquefois, à Hambourg, à des Allemands et à des négociants hollandais. J'ai surtout appuyé sur le ridicule de se laisser séduire aux éloges outrés que l'on fait de la reine de Hongrie et du roi de France, parce que j'ai vu bien des gens être la dupe de ces éloges. Je me flatte que V. M. trouvera que j'ai traité cet endroit avec toute la modération possible. Je cherche à prendre un air d'impartialité qui peut servir mieux que la trop grande vivacité. Ce qui me fait plaisir, c'est que ces Lettres se débitent en allemand; cela pourra les rendre utiles; sans cela elles l'auraient été fort peu. Je ne connais pas davantage le traducteur que je suis connu de lui. Tout le monde est ici persuadé que les Lettres françaises sont véritablement faites par un ministre, ou du moins par un bon protestant.
Je remercie V. M. de la bonté qu'elle a de permettre que je prenne les eaux à Sans-Souci. Je ne manquerai pas d'avoir l'honneur d'écrire à V. M. dès que j'y serai arrivé, et de l'instruire de ce qu'elle souhaite savoir. Puisse-je avoir le bonheur de la voir bientôt comblée de gloire et jouissant d'une tranquillité parfaite dans ce beau séjour qu'elle continue de faire embellir!
Je joins aux Lettres françaises deux exemplaires des deux premières allemandes, si par hasard V. M. avait envie de les faire lire à quelqu'un qui n'entendît pas le français. J'ai l'honneur, etc.
64. AU MARQUIS D'ARGENS.
Madlitz, 16 août 1759.
Nous avons été malheureux, mon cher marquis, mais pas par ma faute.a La victoire était à nous, elle aurait même été complète, lorsque notre infanterie s'impatienta, et abandonna mal à propos le champ de bataille. L'ennemi marche aujourd'hui à Miillrose, pour se joindre à Hadik. L'infanterie russienne est
a Frédéric parle de la bataille de Kunersdorf, livrée le 12 août 1759. Voyez t. V, p. 19-21.