3. A LA MARQUISE D'ARGENS.
Potsdam, 4 avril 1771.
Je vous remercie de tous les détails que vous m'avez envoyés sur la maladie et la mort de mon cher marquis; ils m'ont touché sensiblement. Que n'est-il resté avec nous! Peut-être vivrait-il encore. On aime ainsi à se flatter sur une chose qui nous intéresse. Je sens, comme je vous l'ai dit, toute la perte que vous avez faite; elle est irréparable, marquise, toutes les larmes et tous les regrets ne rappelleront point à la vie celui qui n'est plus. Vous devez vous faire une raison de votre douleur et ne pas irriter vos maux par des désirs inutiles. Ce sera certainement avec plaisir que j'apprendrai que vous êtes aussi heureuse que je le désire, et que vous trouvez toujours <430>dans la famille du bon marquis les sujets de satisfaction que vous devez en attendre. Sur ce, je prie Dieu qu'il vous ait en sa sainte et digne garde.
P. S. Votre seconde lettre vient de me parvenir. Soyez assurée qu'on ne fera point ici aucun mauvais usage de ce que vous me mandez. Je souhaite que vous soyez contente des égards que votre famille vous marquera sans doute. Mais, si vous vous trouviez dans le cas d'avoir besoin de mon appui pour vous garantir des mauvais procédés, de quelque nature qu'ils soient, marquez-le-moi naturellement. Dites-moi si l'on pourrait faire au marquis une épitaphe, et si cela pourrait se réaliser dans le pays où vous êtes, sans vous exposer et lui.