<37>temps nous a conservé de plus précieux des écrits de l'antiquité. Un homme sans passion préférera la Henriade aux poëmes d'Homère. Henri IV n'est point un héros fabuleux; Gabrielle d'Estrées vaut bien la princesse Nausicaa. L'Iliade nous peint les mœurs des Canadiens : Voltaire fait de vrais héros de ses personnages; et son poëme serait parfait, s'il avait su intéresser davantage pour Henri IV, en l'exposant à de plus grands dangers. Boileau peut se comparer avec Juvénal et Horace; Racine surpasse tous ses émules de l'antiquité; Chaulieu, tout incorrect qu'il est, l'emporte sûrement de beaucoup, dans quelques morceaux, sur Anacréon; Rousseau excella dans quelques odes; et, si nous voulons être équitables, il faut convenir qu'en fait de méthode les Français l'emportent sur les Grecs et sur les Romains. L'éloquence de Bossuet approche de celle de Démosthène; Fléchier peut passer pour le Cicéron de la France, sans compter les Patru, les Cochin et tant d'autres qui se sont rendus célèbres dans le barreau. La Pluralité des mondes et les Lettres persanes sont d'un genre inconnu à l'antiquité; ces écrits passeront à la postérité la plus reculée. Si les Français n'ont aucun auteur à opposer à Thucydide, ils ont le Discours de Bossuet sur l'histoire universelle; ils ont les ouvrages du sage président de Thou, les Révolutions romaines par l'abbé de Vertot, ouvrage classique, la Décadence de l'empire romain de Montesquieu, enfin tant d'autres morceaux ou d'histoire ou de belles-lettres ou de commerce ou d'agrément, qu'il serait trop long d'en faire ici le catalogue.
On sera peut-être surpris que les lettres qui fleurissent en France, en Angleterre, en Italie, n'aient pas brillé avec autant d'éclat en Allemagne. La raison en est qu'en Italie elles avaient été rapportées une seconde fois de la Grèce, après y avoir joui, sur la fin de la république et des premiers empereurs, de toute la considération qu'elles méritent : le terrain était tout préparé pour les recevoir; et la protection des Médicis, surtout celle de Léon X, contribua beaucoup à leurs progrès.
Les lettres s'étendirent facilement en Angleterre, parce que la forme du gouvernement autorise les membres des chambres à haranguer dans le parlement; l'esprit de parti les animait même à étudier, afin qu'employant dans leurs discours les règles de la