<72>et l'on apprit d'eux qu'environ avant une demi-heure M. de Neipperg venait de prendre Grottkau : un lieutenant, nommé Mützschefahl, y commandait avec soixante hommes; il se défendit trois heures contre toute l'armée autrichienne. Les déserteurs déposèrent de plus que le lendemain l'ennemi marcherait à Ohlau, pour y prendre la grosse artillerie que le Roi y avait mise en dépôt. Sur cette nouvelle, les différentes colonnes de l'armée, qui étaient toutes en marche, furent aussitôt assemblées. Le Roi la partagea en quatre divisions, qui cantonnèrent dans quatre villages, assez près les unes des autres pour qu'en moins d'une heure elles pussent être assemblées à leur rendez-vous. Le Roi prit son quartier dans les villages de Pogarell et d'Alzenau,a d'où il dépêcha différents officiers à la garnison d'Ohlau pour l'avertir de son approche, et pour attirer à lui deux régiments de cuirassiers qui venaient d'arriver dans ces environs; aucun de ces officiers ne put y arriver, à cause des partis ennemis qui infestaient ces contrées.
Le jour suivant, la neige fut si épaisse, qu'à peine distinguait-on les objets à vingt pas; cependant on apprit que l'ennemi s'était approché de Brieg. Si ce mauvais temps avait continué, l'embarras des Prussiens n'aurait fait que s'accroître : les vivres commençaient à devenir rares; il fallait secourir Ohlau, et en cas de malheur il n'y avait aucune retraite; mais la fortune suppléa à la prudence.
Le lendemain, 10 d'avril, le temps parut clair et serein; et, quoique la terre fût couverte de deux pieds de neige, rien ne s'opposait aux opérations qu'on voulait entreprendre. Dès les cinq heures du matin, l'armée se rassembla auprès du moulin de Pogarell : elle consistait en vingt-sept bataillons, vingt-neuf escadrons de cavalerie et trois de hussards. Elle se mit en marche sur cinq colonnes : celle du milieu était d'artillerie; les deux plus voisines du centre, d'infanterie; et les deux aux extrémités des ailes, de cavalerie. Le Roi savait que l'ennemi lui était supérieur en cavalerie : pour obvier à cet inconvénient, il mêla entre les escadrons de chaque aile deux bataillons de grenadiers; c'était une disposition dont Gustave-Adolphe avait fait usage à la bataille de Lützen, et dont selon toute apparence on ne se servira plus.
a Ces deux villages ne sont séparés que par une route.