<89>il n'a point simulé, ni été faux; il s'est démasqué d'abord, et agi honnêtement. Je doute de vous écrire plus d'ici. C'est une triste année pour moi. Conservez-nous l'alliance, et qu'ils se gardent de faux et simulés amis, qui suis

Votre affectionnée tante,
Élisabeth.

Le style de ces lettres découvre combien la cour de Vienne avait le cœur ulcéré des progrès des Prussiens en Silésie, et que cette cour ne respirait que la vengeance. Mais quelle dialectique! quiconque attaque la maison d'Autriche ne saurait croire en Dieu! offrir la paix lorsqu'on est libre de la faire, et refuser des conditions proposées après d'autres traités signés, s'appelle fausseté, perfidie! C'est le langage de l'amour-propre et de l'orgueil, qui supprime l'exactitude du raisonnement. Ainsi à Vienne on envisageait l'alliance formée contre la pragmatique sanction comme la guerre des Titans, qui voulaient escalader les cieux pour détrôner Jupiter.

De leur côté, les Suédois n'étaient pas aussi heureux que leurs alliés : un détachement de douze mille hommes avait été taillé en pièces par les Russes, auprès de Willmanstrand. Cet échec était considérable pour ce royaume affaibli et ruiné depuis Charles XII. La France en fut mortifiée; elle se proposa de redresser d'un autre côté le revers qu'avaient essuyé ses alliés : elle voulut que le maréchal de Maillebois, avec l'armée qu'il commandait en Westphalie, pénétrât dans l'électorat de Hanovre, pour se rendre maître de ces États. Le Roi fit une grande faute alors en employant tout son crédit pour dissuader les Français de ce dessein, alléguant que par cette entreprise ils se rendraient odieux à l'Europe, révolteraient contre eux tous les princes d'Allemagne; et qu'allant s'attacher à un objet de peu d'importance, ils négligeraient l'objet principal, qui était d'écraser la reine de Hongrie avec toutes leurs forces. Les Français auraient pu réfuter facilement un raisonnement aussi faible : s'ils avaient pris alors l'électorat de Hanovre, jamais le roi d'Angleterre n'aurait pu faire des diversions sur le Rhin, comme en Flandre.