17. AU MÊME.
Königingrätz, 20 juillet (1758).
Mon cher mylord, je n'ai pas douté de la part que vous prendriez à la mort de mon pauvre frère.a C'est un grand sujet d'affliction pour moi; mais je n'ai pas seulement le temps de le pleurer. Voici, mon cher mylord, de nouveaux ennemis auxquels il faut résister. C'est un métier de chien que je fais. Si la moindre mesure me manque, je suis perdu. Veuille le ciel mettre une fin heureuse à cette dure carrière! D'Alembert en parle à son aise; mais nous qui sommes jugés non sur nos mesures, mais sur les événements, le moindre revers nous rend et malheureux, et ridicules encore. Adieu, mon cher mylord; vivez en paix à Colombier, et faites dire des messes pour l'âme de votre ami qui est en purgatoire. Je vous embrasse de tout mon cœur.
18. AU MÊME.
Schönfeld, 25 septembre 1758.
Vous êtes curieux, dites-vous, mon cher mylord, d'apprendre des détails de cette bataillea dont vous me faites des compliments. Comme j'ai été continuellement en mouvement depuis ce temps-là, vous aurez trouvé la relation qui en a été publiée fort sèche. Tout ce que je puis vous en dire, c'est que les Russes n'ont aucuns généraux. Ils ne savent pas faire la guerre avec l'art des peuples policés, d'où vient que le soldat, faisant un faux emploi de sa valeur, est facilement mis en déroute. Notre cavalerie a presque tout fait. L'ennemi a perdu vingt-six mille morts sur la place. Cela paraît prodigieux, mais cela est très-vrai. Nous
a Auguste-Guillaume, Prince de Prusse, mort à Oranienbourg le 12 juin 1758.
a La bataille de Zorndorf.