<180>S. M. est voisine de ma grande souveraine russe. Je suis toujours fâché qu'ils n'aient pu s'ajuster pour donner congé à Mustapha; je suis encore dans l'erreur sur Ali-Bey; elle-même y est aussi. Pourquoi n'a-t-elle pas envoyé quelque Juif sur les lieux s'informer de la vérité? Les Juifs ont toujours aimé l'Égypte, quoi qu'en dise leur impertinente histoire.
Je savais très-bien ce que faisaient des ingénieurs sans génie, et j'en étais très-affligé. Je trouve tout cela aussi mal entendu que les croisades; il me semble qu'on pouvait s'entendre, et qu'il y avait de beaux coups à faire.
J'ai bien peur que les Velches et même les Ibères n'échouent. Leurs entreprises, depuis longtemps, n'ont abouti qu'à nous ruiner.
Je frappe trois fois la terre de mon front devant votre trône du Pégu, voisin du trône de la Chine.
431. DU MÊME.
Ferney, 11 janvier 1771.
A L'AUGUSTE PROPHÈTE DE LA NOUVELLE LOI.
Grand prophète, vous ressemblez à vos devanciers envoyés du Très-Haut : vous faites des miracles. Je vous dois réellement la vie. J'étais mourant au milieu de mes neiges helvétiques, lorsqu'on m'apporta votre sacrée vision. A mesure que je lisais, ma tête se débarrassait, mon sang circulait, mon âme renaissait; dès la seconde page je repris mes forces, et par un singulier effet de cette médecine céleste, elle me rendit l'appétit, en me dégoûtant de tous les autres aliments.
L'Éternel ordonna autrefois à votre prédécesseur Ézéchiel de manger un livre de parchemin;a j'aurais bien volontiers mangé votre papier, si je n'avais cent fois mieux aimé le relire. Oui,
a Ezéchiel, chap. III, v. 1.