<273>que l'un a été justicié publiquement, il puisse pardonner à l'autre sans paraître en contradiction avec lui-même. Je ne sache pas que les juges du chevalier La Barre aient été punis; je n'ai point entendu dire qu'on ait sévi contre aucun des assesseurs du tribunal d'Abbeville; ainsi, à moins que du fond de Ferney vous ne gouverniez la France, je ne saurais me persuader que vous obteniez quelque grâce en faveur de ce jeune homme. Le seul profit qu'il pourra tirer de son voyage, ce sera d'être détrompé par vous des préjugés qu'il peut avoir peut-être en faveur de son métier; mais je vous l'abandonne, et en cas que vous le convertissiez, il ne me sera pas difficile de le remplacer par un autre. Je vous avertis encore qu'il se trouve deux décrotteurs à Magdebourg, qui jadis ont été soldats dans le régiment de Picardie, et à Berlin un perruquier qui a servi dans les armées de M. de Broglie; ils sont très-fort à votre service, si vous les voulez avoir à Ferney pour y augmenter la colonie que vous y établissez. C'est sur quoi j'attends votre résolution, et, quoique ayant encouru votre haine et votre disgrâce, je prie Apollon, et Esculape son fils, dieu de la médecine, de vous conserver dans leur sainte garde.
484. AU MÊME.
Potsdam, 16 février 1774.
Vous devez savoir que je suis Teuton de naissance, et que par conséquent la langue française n'est pas ma langue maternelle. Quelque peine que vous vous soyez donnée de m'enseigner les finesses de votre langue, je n'en ai pu profiter autant que je l'aurais voulu, soit par distraction des affaires, soit par une vie active que les devoirs de mon emploi m'ont obligé de mener. J'ai donc pu mal entendre votre ouvrage sur la Tactique, et je n'ai jamais vu que les termes de haine et de donner à tous les diables se soient jamais trouvés dans aucun dictionnaire de billets doux, à moins qu'ils ne fussent écrits par Tisiphone, Mégère ou Alecton.