<371>qu'une main pour avoir l'honneur de vous écrire, et un cœur pour regretter le temps où il était auprès de vous.
Puisque V. M. m'ordonne de lui envoyer la correspondance d'un bénédictin avec M. Pauw, je la mets à vos pieds; j'en retranche un fatras de pièces étrangères qui grossissaient cet inutile volume; j'y laisse seulement un petit ouvrage de Maxime de Madaure,a célèbre païen, ami de saint Augustin, célèbre chrétien. Il me semble que ce Maxime pensait à peu près comme le héros de nos jours, et qu'il avait l'esprit plus conséquent et plus solide que M. l'évêque d'Hippone. Le paquet est un peu gros pour partir par la poste; mais V. M. l'ordonne.
Je lui souhaite la santé et la longue vie du maréchal Keith;a je lui souhaite un doux repos, qu'il a bien mérité par son activité en tout genre. Je suis au désespoir de mourir loin de lui; j'ose lui demander avec autant de respect que de tendresse la continuation de ses bontés.
542. A VOLTAIRE.
Potsdam, 19 mars 1776.b
Il est vrai, comme vous le dites, que les chrétiens ont été les plagiaires grossiers des fables qu'on avait inventées avant eux. Je leur pardonne encore les vierges en faveur de quelques beaux tableaux que les peintres en ont faits; mais vous m'avouerez cependant que jamais l'antiquité, ni quelque autre nation que ce soit, n'a imaginé une absurdité plus atroce et plus blasphématoire que celle de manger son Dieu. C'est le dogme le plus révoltant, le plus injurieux à l'Être suprême, le comble de la folie et de la démence. Les gentils, il est vrai, faisaient jouer à leurs dieux des rôles assez ridicules, en leur prêtant toutes les
a Œuvres de Voltaire, édit. Beuchot, t. XLII, p. 300-313.
a Mylord Marischal. Voyez t. XX, p. XVIII, et p. 285-332.
b Le 9 mars 1776. (Variante des Œuvres posthumes, t. IX, p. 318.)