<394>le haut mal, mais qu'il s'est borné à guérir, de son temps, quelques-uns de ses contemporains, aussi peu pourra-t-on reprocher au savant médecin des âmes de Ferney de n'avoir pu détruire la superstition ni le fanatisme, et de n'avoir appliqué son remède qu'à ceux qui étaient guérissables.
Mon individu, qui s'est mis à son régime, le bénit mille fois, en lui souhaitant longue vie et prospérité; c'est dans ces sentiments que le solitaire de Sans-Souci salue le patriarche des incrédules. Vale.
555. AU MÊME.
Potsdam, 26 mars 1777.
Des trois raisons qui vous ont empêché de me répondre, la première et la seconde sont une suite des lois de la nature, mais la troisième est un effet de la méchanceté des hommes, qui me les ferait haïr, si, par bonheur pour l'humanité, il n'y avait encore des âmes vertueuses en faveur desquelles on fait grâce à l'espèce. Mais quelle cruelle méchanceté de persécuter un vieillard, et de prendre plaisir à empoisonner les derniers jours de sa vie! Cela fait horreur, et me révolte de telle sorte contre les bourreaux tonsurés qui vous persécutent, que je les exterminerais de la face de la terre, si j'en avais le pouvoir. Le pauvre Morival, qui, jeune encore, a essuyé leurs persécutions, en a eu le cœur si navré, et principalement de l'inhumanité de ses parents, qu'il a été, ces jours passés, attaqué d'apoplexie. On espère cependant qu'il s'en remettra. C'est un bon et honnête garçon qui mérite qu'on lui veuille du bien par son application et le désir qu'il a de bien faire. Je suis persuadé que vous compatirez à sa situation.
Ceux qui vous ont parlé du gouvernement français ont, ce me semble, un peu exagéré les choses. J'ai eu occasion de me mettre au fait des revenus et des dettes de ce royaume : ses dettes sont énormes, les ressources épuisées, et les impôts multipliés