85. DE L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.
Pillnitz, 31 juillet 1767.
Sire,
Si jamais j'eusse supposé à Votre Majesté l'âme d'un Catilina ou d'un Cromwell, vous m'eussiez donné de terribles frayeurs en ma vie, et vous m'en donneriez encore. Mais, Sire, vous ne me croyez sûrement pas si mauvais juge. Si vous me permettez de parler d'après vous-même, je vous accuserai d'avoir trop aimé la gloire, cette gloire funeste des combats; mais après la confession magnanime et philosophique que vous en faites, qui vous refuserait l'absolution? Enchantée de vous voir maintenant dans des sentiments pacifiques, je souhaite à V. M. pour récompense les plus pures douceurs de la vie tranquille, et tous les agréments de la campagne; que Sans-Souci vous offre les plus délicieuses productions de la nature; que la belle saison, l'air du matin et la promenade conservent votre santé, et vous nourrissent l'imagination d'idées riantes. Je vous souhaite, Sire, les biens que je désire pour moi-même, et que je cherche à me procurer ici. Mais Pillnitz est à tous égards bien inférieur à Sans-Souci, si ce n'est peut-être pour les points de vue. Il faut se contenter de ce que l'on a. Ce commerce de V. M. me rendra philosophe, ou ce sera ma faute; mais il produira certainement toujours chez moi l'admiration, et fortifiera tous les autres sentiments avec lesquels je suis, etc.
86. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.
Le 7 août 1767.
Madame ma sœur,
Souffrez, madame, que je me félicite de ce que je ne passe plus pour un Attila, pour un Genseric à vos yeux; il m'aurait été dur