<250>et à mon goût de me régler sur le déjeuner d'Ézéchiela pour devenir voyant. J'avoue encore d'ailleurs, madame, que ce n'est pas chez vos Bavarois où j'aspire à passer pour prophète; ces gens savent malheureusement que je suis schismatique et hérétique, et ces deux qualités m'excluent universellement de tous les dons de l'esprit. Mais on en peut avoir d'autres, et je préfère celui de discerner les qualités et les talents éminents dans ceux qui les possèdent. L'hérésie n'y fait rien, et cela me suffit pour admirer les qualités supérieures qui se trouvent dans les grandes âmes de ceux dont j'ai l'honneur d'être le contemporain. Je ne nomme personne, pour ne choquer la modestie d'aucune grande princesse; je réserve ces sentiments in petto, et je me contente de me rappeler tous les charmes de l'esprit, les grâces, les connaissances et tout l'acquis d'une certaine diva An..... Mais je n'achève pas; ma pudeur respecte la modestie de celle dont je parle, et je me borne, madame, à prier V. A. R. de se souvenir quelquefois du plus zélé de ses adorateurs, et de me faire la justice de me croire avec autant de considération que d'attachement, etc.
167. DE L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.
Munich, 16 mai 1773.
Sire,
La dernière lettre que Votre Majesté m'a fait l'honneur de m'écrire m'a mise de très-mauvaise humeur contre cet enchaînement des causes premières et secondes qui gouvernent le monde. Est-il possible que, quand Frédéric désire la paix, qu'il s'y emploie, qu'il l'espère, cette paix pourtant ne se fait pas? Je vous avoue, Sire, que tout ceci ne met pas moins en déroute ma philosophie que ma politique. Je suis outrée d'apprendre que ce soient les ulémas qui font les récalcitrants. Le passé leur devrait
a Ézéchiel, chap. II, v. 9 et suivants.