<393>ler se mettre à ses pieds, et de lui demander ses ordres, dont j'espère qu'il s'acquittera avec tout le zèle et toute la capacité possible.
Je suis avec le plus profond respect, etc.
23. DU MÊME.
Paris, 1er mars 1765.
Sire,
M. Helvétius doit partir incessamment pour aller mettre aux pieds de V. M. son admiration et son profond respect;a c'est un hommage, Sire, que tous les philosophes vous doivent, et qu'un philosophe comme lui est bien digne de rendre à un prince tel que vous. J'ose espérer que V. M., en connaissant sa personne, ajoutera encore à l'idée avantageuse qu'elle avait déjà de ses talents et de ses vertus; l'accueil qu'il recevra d'elle le consolera des persécutions que lui ont suscitées des fanatiques qui font à eux tous moins de bonnes actions dans toute leur vie qu'il n'en fait dans un jour, et qui ont trouvé plus court et plus facile de brûler son livre que d'y répondre.
Je ne suis pas, Sire, dans le cas de dire à M. Helvétius ce qu'Ovide disait à ses vers : « Vous irez sans moi, et je ne vous porte point envie; »b car j'envie d'autant plus le bonheur dont il va jouir, que je l'ai déjà goûté. Mais ma santé longtemps dérangée et encore chancelante ne me permet pas ce voyage, et je me plains d'elle avec plus de raison que Louis XIV, dans l'Épître de Boileau, ne se plaint de sa grandeur, qui l'empêche de passer le Rhin à la vue de l'ennemi.c La privation que mon état me fait éprouver aujourd'hui est la plus fâcheuse diète à laquelle il m'ait
a Voyez t. XIX, p. 446.
b Tristes, livre I, élégie 1, v. 1. Voyez t. XXI, p. 26.
c Louis, les animant du feu de son courage,
Se plaint de sa grandeur, qui l'attache au rivage.