<408>ler en votre style, ce prince trouve que votre politesse redouble pour les étrangers en raison inverse du carré des maux qu'on vous a faits.
Vous me parlez d'un Abrégé chronologique de l'Histoire de l'Église, que je ne connais point.b Je lis rarement des préfaces; cependant j'ai ouï dire que l'auteur de celle-là était aussi effronté qu'insolent, qu'il a eu l'impertinence de prouver par un factum que Jean le Blanc n'était que Jean-Farine.c
On dit qu'on est toujours en train de brûler les livres en France. C'est une ressource en cas de grand hiver; si le bois manque, les livres ne manqueront pas, pourvu qu'on ne brûle que l'écriture, et non les auteurs, ce qui deviendrait trop sérieux; et je me mettrais de mauvaise humeur, si l'on dressait des bûchers pour de certains philosophes auxquels je m'intéresserai toujours. Sur ce, etc.
32. DE D'ALEMBERT.
Paris, 12 septembre 1766.
Sire,
M. de la Grange est arrivé ici le 2 de ce mois, suivant la permission que V. M. lui a donnée de passer par Paris; je l'ai vu tous les jours, et je l'ai trouvé plein de reconnaissance des bontés de V. M., et bien empressé de répondre aux justes idées qu'elle a conçues de lui. Votre Académie, Sire, acquiert en lui non seulement un très-grand géomètre, égal pour le moins à ce que l'Europe possède aujourd'hui de meilleur en ce genre, mais un vrai philosophe, dans tous les sens possibles de ce mot, supé-
b L. c., p. 113 et 129.
c Ce furent les comédiens qui imaginèrent les premiers en France de poudrer les cheveux; les personnages bouffons se saupoudraient la tête et le visage de farine, pour se donner un air plus risible; de là vient l'expression triviale de Jean-Farine. Dictionnaire des Proverbes français (par Pierre de la Mésangère). Seconde édition. A Paris, 1821, p. 240.