<409>rieur aux préjugés et aux superstitions des hommes, sans ambition, sans intrigue, n'aimant que le travail et la paix, du caractère le plus doux et le plus sociable. Il m'a prié, Sire, de demander à V. M. une grâce qu'il lui sera sûrement facile d'obtenir. M. Euler était directeur de la classe de mathématiques; il paraîtrait assez naturel que M. de la Grange succédât à cette place, puisque V. M. l'appelle pour remplacer M. Euler, qu'il est certainement bien en état de remplacer. Cependant, si V. M. a d'autres vues par rapport à cette place de directeur, M. de la Grange, très-content des quinze cents écus que V. M. veut bien lui donner, n'insistera point sur cet objet; il prie seulement V. M. de vouloir bien nommer le directeur avant son arrivée, afin que la cour de Turin, qui n'a pas voulu le retenir, et qui est pourtant fâchée de l'avoir perdu, ne s'imagine pas que M. de la Grange, en arrivant à Berlin, ait commencé par essuyer un dégoût apparent. Il importe, Sire, à l'avantage des sciences et des lettres, que V. M. protége, de ne pas laisser le plus petit sujet de triomphe contre elles à ceux qui les négligent, et qui voudraient bien qu'elles ne trouvassent pas dans les États d'un grand roi l'honneur et l'asile qu'elles méritent.
Je compte, Sire, que M. de la Grange sera à Berlin vers le 15 d'octobre; son arrivée ne sera point retardée par un voyage très-court que des raisons d'amitié vraiment respectables l'obligent à faire à Londres, parce que M. de la Grange prendra le temps de ce voyage sur celui qu'il me destinait, et que V. M. lui avait permis de me donner, et parce que, d'ailleurs, le trajet de Londres à Berlin par mer sera beaucoup plus court, moins embarrassant et moins dispendieux que le voyage par terre de Paris à Berlin, que la difficulté des chemins, l'incommodité des voitures et l'ignorance de la langue auraient rendu long et difficile.
M. de la Grange m'a parlé, Sire, d'un autre excellent sujet dont il croit que V. M. pourrait faire aisément l'acquisition pour son service militaire, et même, comme par surcroît, pour son Académie. Il se nomme M. le chevalier Daviet de Foncenex, homme de condition et de beaucoup de mérite, surtout dans la partie de l'artillerie et du génie; M. de la Grange est persuadé qu'il serait propre à former en ce genre une excellente école. Il