<422>d'en redescendre au gré du géomètre, cela ne peut jamais établir la moindre analogie entre le spectacle d'une belle matinée et les sons articulés. Tenons-nous-en donc en musique à l'expression des affections de l'âme, et gardons-nous de rendre les cris des grenouilles, le croassement des corbeaux, et cent autres sujets dont l'imagination est vicieuse en musique comme en poésie. Toutes les choses de ce monde, ainsi que les arts qui servent à nos plaisirs, ont leurs bornes circonscrites; si nous les étendons au delà de leur sphère, nous les dénaturons au lieu de les perfectionner. Je ne suis qu'un dilettante, et je ne décide point sur des matières qu'à peine il m'est permis d'effleurer; mais vous avez voulu que je vous disse ce que je pense; le voilà.
Pour M. l'abbé d'Olivet, dont je suis le très-humble serviteur, bien loin de lui vouloir du mal de son crêp, ou crêpe, je lui ai la plus grande obligation de ce qu'il m'a cité; depuis, je me crois un auteur fameux, et je prends les airs de suffisance d'un poëte dont il est fait mention dans l'Académie française. Je recommande mes solécismes et mes barbarismes à son indulgence; car dans ce pays-ci on craint plus les censures grammaticales que celles de la Sorbonne et du pape même.
Vivent les philosophes! voilà les jésuites chassés de l'Espagne.a Le trône de la superstition est sapé, et s'écroulera dans le siècle futur; toutefois prenez garde qu'il ne vous écrase en tombant; car la chute de tous les trônes du monde ne vaut pas les chagrins et les persécutions qui troublent le bonheur de notre vie. Je vous souhaite un bonheur constant et inaltérable. Sur ce, etc.
a Voyez t. XXIII, p. 137 et 153. C'est dans sa lettre à l'électrice Marie-Antonie, du 1er février 1768 (ci-dessus, p. 164), que Frédéric parle pour la première fois de son intention de conserver les jésuites.