<509>fumants, où tant de malheureux ont perdu la vie, dévorés par les flammes. Ah! que l'Italie était préférable à la Provence! Le cordelier Ganganelli est tout accoutumé au mouvement de la terre, il consent tacitement qu'elle tourne, et vous n'auriez point eu à craindre à Rome le sort de Galilée. Mais enfin, tout philosophe que vous êtes, gardez-vous bien de résister à la Faculté; les médecins sont infaillibles autant que le pape à la tête d'un concile œcuménique. Je vous prie de vous bien imprimer cette vérité, afin que, s'ils vous ordonnent le voyage de Berlin pour vous rétablir l'estomac, vous ne manquiez pas de l'entreprendre, et surtout de ne vous point raviser, arrivé en Westphalie. Sur ce, etc.

89. AU MÊME.

(Novembre 1770.)

Je vous remercie des Mélanges de littérature que vous m'avez envoyés; puisque je ne puis pas avoir votre personne, je suis au moins bien aise d'avoir vos ouvrages. J'attends avec beaucoup d'impatience les nouveaux détails dont vous ornerez vos Essais de philosophie,b persuadé comme je le suis que vous seul pouvez les bien faire. Si vous ne faites pas le voyage d'Italie, ce pays y perd autant que vous, parce qu'il est plus facile de trouver des ruines que de bons philosophes. Je suis fâché cependant que vous ne puissiez pas faire cette course si intéressante pour tout homme de lettres. La calomnie vous attaque; j'en suis d'autant


b Frédéric veut parler des Éléments de philosophie, ouvrage qui forme le quatrième volume des Mélanges littéraires cités ci-dessus, p. 523, et qu'il nomme aussi Essais dans sa lettre à Voltaire, du 17 février 1770. Voyez t. XXIII, p. 169.