<552>abominables maximes des Jean Petit,a des Busembaum,b des Malagrida?c Est-ce à des amateurs de la sagesse d'encourager le crime? et après l'attentat de Damiens, ne devrait-on pas être assez circonspect pour ne point échauffer quelque cerveau brûlé par des maximes infernales qui le peuvent porter aux crimes les plus atroces? Si Virgile, si Cicéron, si Varron, si Horace, avaient été noircis de ces traits, ils n'auraient jamais joui dans Rome de la réputation qu'ils conservent encore. Pour rendre les lettres respectables, il faut non seulement du génie, mais surtout des mœurs. Mais ce métier est devenu trop commun, trop de grimauds s'en mêlent, et ce sont eux qui le décréditent.

Pour ce qui vous regarde, je suis bien aise de voir la confiance que vous avez en moi; elle ne sera pas trompée, quoique ce délabrement des finances d'un prince qui a quatre cents millions de revenus me paraisse bien étrange. Vous voulez savoir si un manuscrit de Pline le naturaliste, qui concerne les guerres des Germains, se trouve à Magdebourg? Quoique je n'aie pas encore reçu de réponse de là-bas, je crois que c'est un fait controuvé, accrédité sur la foi d'un voyageur; car si un tel manuscrit existait, vous pouvez être persuadé qu'il serait connu; je n'en ai jamais entendu parler, non plus que nos doctes.

Je puis vous répondre avec plus de précision sur le sujet de cette dame qui prétendait passer pour l'épouse du czarowitz; son imposture a été découverte à Brunswic, où elle a passé peu après la mort de celle dont elle emprunta le nom; elle y reçut quelques charités, avec ordre de quitter le pays et de ne jamais prendre un nom dont sa naissance l'écartait si fort. Croyez qu'on sait comme il faut tuer son monde en Russie, et que lorsqu'on expédie quelqu'un, principalement à la cour, il ne ressuscite de sa vie. Le contraire pourrait nous arriver, à nous qui ne sommes pas aussi versés dans ce métier. Demandez donc, s'il vous plaît, quand vous verrez quelque ressuscité : De grâce, monsieur ou


a Le cordelier Jean Petit, docteur de l'université de Paris, justifia publiquement l'assassinat du duc d'Orléans par le duc de Bourgogne (1407).

b Hermann Busembaum, jésuite, né en 1600 à Notteln dans l'évêché de Münster, mourut à Münster en 1668. Il prêcha la monstrueuse doctrine de l'homicide et du régicide.

c Voyez t. IV, p. 254, et t. XIV, p. 222.