<612>donnée au Paraguay par le roi jésuite Nicolas,a dans laquelle le père feld-maréchal avait eu trois capucins tués sous lui. Je mande au philosophe de Ferney que V. M., en établissant ce nouveau régiment dans ses États, ne peut guère se dispenser de faire une recrue de capucins pour remonter cette troupe. J'invite seulement V. M. à retrancher à ses nouveaux soldats les carabines dont on prétend que le roi de Portugal s'est mal trouvé.
Quoi qu'il en soit, Sire, comme il n'est pas à craindre que V. M. prenne jamais un jésuite ni pour confesseur, ni pour général, ni pour premier ministre, ni pour maîtresse, je pense que la philosophie doit être bien tranquille sur l'usage que Y. M. en veut faire, et qu'elle saura les rendre utiles, en les empêchant d'être dangereux. Tel est le résultat de mes réflexions, après m'être égayé un moment sur leur compte et sur celui du cordon de Saint-François qui les frappe et qui les disperse. Mais, Sire, ce qui est vraiment admirable, vraiment précieux à la philosophie, vraiment digne de V. M., c'est la belle inscription qu'elle vient de faire mettre à l'église catholique de Berlin, et que je n'ai apprise que depuis quelques jours : Frédéric, qui ne hait pas ceux qui servent Dieu autrement que lui.b Voilà, Sire, une des plus grandes et des plus utiles leçons que V. M. ait données à ses confrères les rois, tant ses contemporains que ses successeurs. Voilà une leçon dont sûrement ils profiteront un jour, soit par principe de justice, soit par principe au moins de vanité, et pour ressembler en quelque chose au héros de ce siècle. Voilà une inscription qui mérite bien d'être célébrée par une médaille, dont V. M. imaginera mieux que personne le corps et la devise.
Je prie V. M. de vouloir bien recevoir mes très-humbles compliments sur la naissance du prince dont votre auguste maison vient d'être augmentée.a Tout ce qui peut la perpétuer et l'étendre est pour moi l'objet du plus vif intérêt, et j'ose croire que V. M. en est bien persuadée.
a L'histoire de ce jésuite, qu'on disait avoir été couronné en 1754, est une pure fiction; sa prétendue biographie a paru sous le titre de : Histoire de Nicolas Ier, roi du Paraguay et empereur des Mamelus. A Saint-Paul, 1756, quatre-vingt-huit pages in-8.
b Voyez t. XVIII, p. 96.
a Voyez t. XX, p. 197.