132. DE L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.
Dresde, 27 juillet 1770.
Sire,
J'avoue qu'après le bonheur de vous voir, Sire, je ne désire rien tant que vos lettres; mais il faut être juste; quand on a, comme V. M., un peuple de héros à former, on ne saurait assez s'en occuper. Et comment me plaindrais-je d'un délai momentané, tandis que chacune de ses lettres me pénètre d'une nouvelle reconnaissance? Où est le prince qui, au milieu des travaux, faisant tout par lui-même, trouvât encore du temps à donner à ses admirateurs et au genre humain? Je ne sais, Sire, quel sera l'effet <202>des instructions que vous daignez lui accorder. A qui s'en rapporterait-il, ne veut-il pas en croire à Frédéric? Il serait bien ingrat, s'il n'usait pas des sublimes instructions que vous daignez lui donner.
La présence de madame la landgrave doit ajouter à la satisfaction que l'heureuse grossesse de son admirable fille cause à V. M. Nous l'avons eue chez nous pendant quelques moments, assurément trop courts pour nous. Mais a-t-on un moment à perdre, lorsqu'on va à Potsdam? Je le sais par moi-même. Oui, Sire, je compte les heures jusqu'à celle où je pourrai vous porter en personne le tribut de ces sentiments inaltérables qui sont gravés dans mon cœur par l'admiration sincère et l'attachement inviolable avec lequel je ne cesserai d'être, etc.