<156>P. S. J'ai oublié de vous répondre touchant le buste de Voltaire. N'insultons pas à sa patrie en lui donnant un habillement qui le ferait méconnaître; Voltaire pensait en Grec, mais il était Français. Ne défigurons pas nos contemporains en leur donnant les livrées d'une nation maintenant avilie et dégradée sous la tyrannie des Turcs leurs vainqueurs.
221. DE D'ALEMBERT.
Paris, 24 juillet 1780.
Sire,
Quelque désolé que je sois de ne pouvoir aller mettre aux pieds de V. M. tous les sentiments dont je suis pénétré pour elle, la lettre dont elle vient de m'honorer a augmenté, s'il est possible, l'affliction profonde que j'en ressens. Le détail plein de bonté où V. M. veut bien entrer sur mon état excite en moi la plus vive et la plus juste reconnaissance. Elle me propose le remède anglais, que je prendrais bien volontiers, malgré la guerre que cette nation nous fait, si je croyais que ce remède pût me convenir; mais outre qu'il est, dit-on, fort contraire à l'estomac, et que l'estomac, dans ma frêle machine, ne vaut guère mieux que la vessie, il me paraît aujourd'hui bien assuré, d'après des consultations que j'ai faites, que mon mal n'est point la pierre, que c'est un genre de calcul tout différent, qui tient à la chaleur de mon sang, et surtout à celle de la saison, qui diminue quand le temps se refroidit, qui même pendant l'hiver est presque nul, qui augmente quand le temps se réchauffe, et surtout quand mes reins sont réchauffés, et dont le vrai remède sont les bains, les aliments rafraîchissants, le repos, et la précaution de ne pas aller trop longtemps en voiture. Je joins à cela, à mon grand regret, la privation presque entière de travail, et j'en suis d'autant plus affligé, que, n'ayant plus ici aucun objet de liaison, d'intérêt et de société, depuis la perte que j'ai faite il y a quatre