<32>mal, non seulement pour ceux qui la souffrent, mais même pour ceux qui s'intéressent aux souffrants. Celle dont V. M. a été si cruellement attaquée m'a causé les plus vives alarmes, même depuis la dernière lettre que j'ai eu l'honneur de recevoir d'elle; il a couru les plus mauvais bruits à ce sujet, et ce n'a été qu'à force d'informations que je suis parvenu à calmer un peu mes inquiétudes. Cependant, Sire, je n'en serai entièrement délivré que quand V. M. aura bien voulu me faire donner des nouvelles de son état, car je n'ose lui en demander à elle-même, et ne me laisser plus aucun doute sur le rétablissement d'une santé aussi précieuse à mon cœur.
J'ai reçu une lettre de divus Etallundus, comme V. M. l'appelle; il me paraît pénétré de reconnaissance des bontés de V. M., et bien résolu de ne rien négliger pour s'en rendre digne. J'espère que son application, sa conduite et ses mœurs prouveront à V. M., ou plutôt aux fanatiques absurdes et atroces à qui vous avez arraché cette malheureuse victime, qu'on peut être digne des bienfaits et de l'estime d'un grand roi, quoiqu'on ait passé à dix-huit ans devant une procession de capucins, en temps de pluie, sans avoir l'honneur de saluer.
Sur l'espérance que V. M. veut bien me donner d'avoir égard dans une autre circonstance à la requête que j'ai eu l'honneur de lui présenter en faveur de M. Béguelin, je prends la liberté de recommander de nouveau à ses bontés cet homme estimable, que j'en crois digne par la sagesse de sa conduite et par son assiduité au travail. J'avais eu l'honneur aussi d'offrir à V. M. de lui chercher quelqu'un pour succéder à M. Marggraf, dans le cas où l'Académie viendrait à perdre cet habile chimiste. Comme je ne fais acception de personne quand il est question de servir V. M. et de faire le bien de son Académie, j'ai appris, il y a peu de temps, qu'il y avait à Stockholm un très-habile chimiste, nommé Scheele,a membre de l'Académie des sciences de cette ville, et qui, sans m'être d'ailleurs connu, me paraît fort estimé par les plus habiles chimistes de la France. V. M. pourrait faire prendre à ce sujet des informations, et faire l'acquisition de ce savant,
a Scheele était pharmacien à Köping, en Suède; né à Stralsund en 1742, il mourut en 1786.