29. AU MÉME.
(Camp de Chlum) ce 16 (août 1745).
Mon cher Rottembourg,
Les déserteurs qui nous viennent ici disent à peu près la même chose que celui que vous m'avez envoyé. Il paraît que les Autrichiens lassent leur préalable de l'élection impériale de Francfort,a après quoi ils pensent d'être en état de tourner leurs forces contre qui bon leur semble. La perspective politique n'est pas fort claire à présent, mais il faut attendre que le brouillard tombe; alors on verra s'il faut donner au prince de Contib des lauriers ou des chardons.
Nous nous amusons ici du mieux que nous pouvons. Outre mes occupations ordinaires, je lis beaucoup, et je puis vous assurer que, à quelques légères escarmouches près, on croirait être dans un camp de paix.
Quand vous recevrez les réponses de France, je vous prie de me les communiquer. Voudriez-vous bien charger Petit encore d'une commission pour me trouver deux beaux groupes de marbre colossals pour orner un jardin? Le sujet m'est égal, pourvu que cela soit beau; quand même ces groupes me coûteraient cinq à six mille écus, je les payerais. Peut-être pourra-t-il aussi trouver de beaux vases de marbre, ornés d'or moulu, pour placer dans un jardin; et ce sont de ces choses qu'il faut pour embellir Potsdam.
Adieu, mon cher Rottembourg; je ne vous entretiens que de billevesées, et je finis comme le curé de Colignac, de peur de dire des sottises.c
a François Ier fut élu le 13 septembre, et couronné le le octobre 1745. Voyez t. III, p. 142.
b L. c., p. 111.
c Ces mots font probablement allusion à une facétie dont nous ne connaissons que le titre : Sermon pour la consolation des cocus, suivi de plusieurs autres, comme celui du curé de Colignac, prononcé le jour des Rois. Amboise. J. Coucou, 1751.