<108>Borcke lui fera reconnaître journellement que, s'il veut parvenir au point de perfection où se borne l'esprit humain, et qu'il ne saurait passer, mais que vous avez atteint à force d'application, il doit suivre vos sages préceptes, et ne se croire heureux que lorsqu'il pourra reconnaître par son attachement l'obligation qu'il vous doit. C'est à moi, en attendant, de m'acquitter de son devoir, et de combiner les sentiments qu'il vous doit à ceux du respect inviolable et du zèle le plus parfait que je vous porte, et qui ne me quitteront qu'avec ma vie, ayant l'honneur d'être, etc.
31. AU PRINCE DE PRUSSE.
Potsdam, 27 septembre 1751.
Monsieur mon frère,
Voici un exemplaire de l'Instruction pour le major comte de Borcke, pour l'éducation de votre fils aîné, dont je vous ai déjà entretenu moi-même. J'espère que vous voudrez bien en faire votre usage, étant avec l'amitié la plus parfaite, etc.a
Je vous envoie, mon cher frère, une copie de l'Instruction de Borcke, afin que vous puissiez voir vous-même si on la suit, ou non. Je vous embrasse mille fois.b
32. AU MÊME.
(Potsdam) ce 12 (février 1753).
Mon cher frère,
Ce n'est pas par un privilége de notre famille que vous trouvez tant de fermeté dans ma sœur de Baireuth;c c'est, mon cher frère, par la philosophie qu'elle s'est élevé l'âme au-dessus des infortunes auxquelles la condition humaine est exposée. Ce sont là les vrais secours que nous tirons des réflexions, de dépouiller tous les objets de leurs attraits, et de les priser au juste; et, dans ce sens, la plupart des malheurs qui arrivent aux hommes ne sont pas aussi grands qu'ils se les font eux-mêmes. Il n'y a que la perte des personnes qu'on aime qui soit réelle et irréparable; et cependant, à ce mal même, la philosophie y apporte des secours; avec son aide et avec celle du temps, on parvient à adoucir une douleur trop vive qui dégraderait l'homme, s'il s'y abandonnait en lâche. Mais, malgré tous nos efforts, il faut avoir quelque indulgence pour la vivacité des premiers moments, et penser que les faiblesses d'un cœur sensible sont préférables à l'inhumaine dureté des stoïciens.
Ne pensez pas qu'aux folies du chevalier Folard j'aie ajouté les miennes; je n'ai fait que choisir encore quelques morceaux intéressants que Seers avait peut-être oublié de tirer de son ouvrage, et je les ai fait joindre aux autres; de sorte que, avec ce
a De la main d'un secrétaire.
b De la main du Roi.
c Voici ce qu'on lit dans l'Éloge (inédit) de la margrave Wilhelmine, composé en 1759 par le marquis d'Adhémar, grand maître de la maison de la princesse défunte : « Un affreux incendie consuma (le 26 janvier 1753) le château de Baireuth et beaucoup d'effets précieux. Leurs Altesses envisagèrent ce triste événement comme un de ces coups de la fortune qui ne doit point abattre les âmes fermes. Leur premier soin fut de consoler leur cour, etc. »