<222>moneurs de cheminées, il serait impossible de les en déloger. Je ne sais quels arrangements l'ennemi prendra. Si les désirs des officiers et des troupes prévalent à Vienne, tout s'en ira en Bohême, parce que tous sont excédés des fatigues qu'ils ont souffertes l'hiver dernier. Si l'intérêt politique prévaut, comme il y a grande apparence, l'armée sera obligée de soutenir sa position. J'ai pris mes arrangements d'avance sur tous les cas. J'entreprendrai tout ce que la prudence me permettra, cependant sans rien hasarder. Je me mettrai dans une telle situation, que, si l'occasion se présente de faire quelque bon coup, je sois en état d'en profiter; mais il ne faut pas qu'on exige de moi des miracles, car je vous déclare net que je n'en sais point faire. Je crois que vous avez à présent la relation que j'ai donnée des détails de la bataille. Il y en a beaucoup que j'ai supprimés, à cause que toutes choses ne sont pas bonnes à dire. Il n'y a aucun de nos généraux de blessé dangereusement. Nous avons cependant fait quelques pertes : votre régiment derechef a beaucoup souffert; le second bataillon de Kalckstein, et en général les grenadiers; mon troisième bataillon n'a pas été épargné non plus; de la cavalerie, les régiments de Baireuth et de Spaen surtout ont fait merveille, et n'ont presque pas fait de pertes. L'emplacement de l'ennemi et la manière dont la bataille s'est engagée était telle, qu'elle n'a pas permis que la cavalerie de notre droite ait pu donner; aussi n'a-t-elle presque point souffert. Vous serez fort étonné que je vous dise que c'est au régiment de Maurice que je suis redevable du gain de la bataille; cependant cela est très-vrai. Je ne crois pas que de mémoire d'homme on ait un exemple d'une canonnade comme celle de cette journée-là; cela surpasse ce que l'on en peut dire; deux tonnerres poussés l'un contre l'autre par des vents contraires ne font pas un bruit plus effroyable. Une des singularités de ce combat que je ne dois point omettre, c'est que nos charges ont continué, malgré l'obscurité, jusqu'à neuf heures et un quart; que, dans la nuit, nous avons été presque pêle-mêle avec les Autrichiens, à nous faire réciproquement des prisonniers les uns aux autres; que toute cette confusion et ce désordre a duré jusqu'au lendemain matin; que l'on a trouvé une grande quantité de pri-