204. A LA MÊME.
Potsdam, 8 mars 1748.
Ma très-chère sœur,
Quoique votre lettre m'ait fait beaucoup de plaisir, je ne saurais nier que ce que vous dites de vos jambes ne m'ait fort inquiété. Je ne puis attribuer ces accidents qu'à des restes de sciatique. Si cependant l'un doit être, j'aimerais mieux que tout votre mal se jetât sur les parties extérieures, et que le corps fût sain. J'espère que l'Histoire de Brandebourg vous aura servi de soporifique, ma chère sœur, et qu'elle vous aura fait dormir pendant quelques heures. Je serai fort content de mon ouvrage, s'il vous procure du repos, et je m'en applaudirai davantage que s'il fût approuvé de l'Europe entière.
Nous avons eu ici un froid terrible; il se passe à présent. Je crains bien qu'il ne retarde un peu votre rétablissement. Le peintre Vanloo est arrivé. Je lui ai proposé pour son début de faire le plafond de la salle de comédie que je fais faire ici.a Nous allons avoir une troupe d'intermezzo qui va faire ici de petites opérettes. Voilà, ma chère sœur, comme nous passons le plus doucement possible notre temps, et comme les plaisirs nous en dérobent la fuite, en l'accélérant. Je fais des vœux sincères pour recevoir bientôt des nouvelles plus consolantes sur votre sujet, vous assurant, très-chère sœur, qu'on ne saurait être avec plus de tendresse que je suis, etc.
a Voyez H. L. Manger's Baugeschichte von Potsdam, p. 87. Le plafond peint par Amédée Vanloo représentait Apollon avec les neuf Muses; la figure de Terpsichore était le portrait de la Barberina. Voyez L. Schneider, Geschichte der Oper und des Königlichen Opernhauses in Berlin. Berlin, 1852, in-8, p. 124 et 125.