<285>à Rome, et capable d'enfumer le sacré collége et le pape même; mais je le prie beaucoup d'assujettir ces heureuses dispositions aux dehors de l'hypocrisie, et de cacher sa gaîté sous un masque discret et plein de formalités. On prend les vices comme les vertus de son état; il faut qu'un ecclésiastique soit hypocrite, ou tout le monde lui jette la pierre. J'espère que l'on sera à présent assez sensé de ne plus faire parade de tremblements de terre; tous ceux qui se mettent à présent sur les rangs viennent trop tard, après celui de Lisbonne; il en faut avoir un pareil, ou se taire. Il n'y a que l'extrémité des excès en tout genre qui fasse du bruit, et ce n'est pas la peine de travailler ni de s'agiter pour faire des choses ordinaires. C'est pourquoi l'on parlera toujours d'un César, d'un Cicéron, d'un Érostrate, d'un Cartouche, d'un Socrate, d'un Trajan, et que les hommes et les accidents vulgaires s'oublient. Quoique je sois fort du nombre de ces derniers, j'espère bien, ma chère sœur, qu'en faveur de l'amitié vous voudrez bien ne point m'effacer de votre mémoire, et me croire avec la plus parfaite tendresse, ma très-chère sœur, etc.
312. DE LA MARGRAVE DE BAIREUTH.
Le 12 février 1756.
Mon très-cher frère,
Quoique je ne sois encore que convalescente, il me semble que le plaisir que j'ai, mon très-cher frère, de vous écrire soulage mes maux. Je les endurerais avec patience, s'ils ne me privaient de la seule consolation qui me reste dans notre séparation, qui est de vous assurer que vous m'êtes infiniment plus cher que moi-même. L'inquiétude que vous avez témoignée à Stefanino sur mon long silence m'est une preuve bien précieuse de vos bontés. Vous m'avez rendu justice, mon cher frère, puisqu'il n'y a que les infirmités de mon corps qui puissent retenir les mouvements de mon cœur, qui vous est trop acquis pour négliger les