<310>si fiers, je les abandonne à leur sens pervers, et je suis à présent en pleine marche pour faire, entre ici et le mois de décembre, changer de face au destin. Les Français viennent de signer une neutralité avec les pays de Magdebourg et de Halberstadt; j'en profite pour employer les jours que cette rude saison m'accorde pour déranger les projets de mes ennemis. Je ne regrette que de ne pouvoir plus avoir l'avantage de recevoir vos lettres; je me tourne vers la Lusace, et de là je compte finir ma campagne aux environs de Schweidnitz. Pour les Français, ils n'entendront pas nommer mon nom, et je compte cependant de leur parler de telle manière par des actions, qu'ils regretteront, mais trop tard, leur impertinence et leur fierté.
333. A LA MÊME.
Près de Weissenfels, 5 novembre (1757).
Ma très-chère sœur,
Enfin, ma chère sœur, je puis vous annoncer une bonne nouvelle. Vous saviez sans doute que les tonneliers,a avec leurs cercles,a voulaient prendre Leipzig. Je suis accouru, et les ai chassés au delà de la Saale. Le duc de Richelieu leur a envoyé un secours de vingt bataillons et de quatorze escadrons; ils se sont dits forts de soixante-trois mille hommes. Hier j'ai été pour les reconnaître, et n'ai pu les attaquer dans leur poste, ce qui les a rendus téméraires. Aujourd'hui ils ont marché en intention de m'attaquer, mais je les ai prévenus. C'était une bataille en douceur. Grâce à Dieu, je n'ai pas eu cent hommes de morts; le seul général mal blessé,a c'est Meinike.b Mon frère Henri et le
a Voyez t. XII, p. 80.
a Le Roi veut dire dangereusement blessé, schlimm blessirt, expression qu'il emploie entre autres dans sa lettre au prince Léopold d'Anhalt-Dessau, du 4 juin 1745.
b Voyez t. IV, p. 167, et t. XXVI, p. 140, 141 et 317.