<374>vous me mettez au rang des personnes que vous chérissez. C'est un motif bien grand, par lequel je réglerai toute ma conduite pour me conserver votre bienveillance. Je n'ai pas osé prendre la liberté à Berlin, mon cher frère, de vous présenter un souvenir; mais permettez-moi à présent de vous offrir une bagatelle. Les faibles mortels donnent des offrandes à leurs divinités, et les dieux reçoivent d'un œil favorable ce qui leur est offert par des cœurs remplis d'amour pour eux. Vous êtes, mon cher frère, ma divinité sur la terre, et j'ai bien lieu de croire que vous accepterez mon offrande par la même raison que les dieux reçoivent celles des mortels. Conservez-moi, je vous supplie, toujours vos bontés, et soyez persuadé que l'on ne peut être avec un attachement plus inviolable que celui avec lequel je suis à jamais, mon très-cher frère, etc.

P. S. Je viens, dans ce moment, de recevoir encore une des plus gracieuses lettres du monde de votre part. J'aurai l'honneur de vous en remercier plus parfaitement à mon arrivée à Stettin.

6. DE LA MÊME.

Schwerinsbourg, 29 juillet 1744, à minuit.



Mon très-cher frère,

Le maréchal de Schwerin ayant le bonheur de vous faire sa cour, je l'ai prié de se charger de cette lettre et de me mettre mille fois à vos pieds. Nous avons été parfaitement bien chez lui, et il est difficile de trouver un meilleur hôte. Je quitte demain tous mes chers compatriotes, et j'avoue que je ne sais comment je pourrai tenir contenance devant les étrangers. Je vous enverrai une estafette, mon cher frère, de Stralsund, où je serai après-demain. Vous me pardonnerez si je finis sitôt ma lettre; mon esprit et mon cœur voudraient encore s'entretenir avec vous, mais la chétive guenillea ne veut plus résister au sommeil, et m'oblige de finir en vous réitérant mille fois le sincère, tendre et respectueux attachement avec lequel j'ai l'honneur d'être, mon très-cher frère, etc.

7. DE LA MÊME.

Ulrichsdal, 26 juillet 1746.



Mon très-cher frère,

Je viens de recevoir dans le moment un ballot qui m'a apporté des figures de porcelaine de Dresde, les plus belles du monde. N'ayant aucune connaissance assurée d'où elles viennent, je ne puis juger autrement que c'est une nouvelle marque, mon cher frère, de vos bontés. Vous me permettrez que j'ose vous en marquer ma parfaite reconnaissance, et vous assurer que l'on ne peut être plus sensible que je le suis à toutes les marques que vous me donnez journellement de l'amitié la plus tendre. Si un attachement parfait pour votre personne pouvait contre-balancer votre bienveillance, je pourrais être contente; mais je ne sens que trop, mon cher frère, que je ne puis rien mettre d'assez fort pour contre-balancer une amitié qui est au-dessus de tous les prix; je n'ai qu'un cœur, qui vous est tout dévoué, et qui vous le sera aussi longtemps que je vivrai.

Je viens d'apprendre dans le moment, par les lettres que le Roi a reçues, que vous aviez, mon cher frère, rappelé le comte Finck. Je conçois les services qu'il est en état de vous rendre, mon cher frère, en Russie, ayant eu occasion de connaître sa capacité et ses bonnes intentions. J'avoue que c'est une vraie perle que le Prince royal, aussi bien que moi, ferons de sa personne, ayant eu sujet de nous louer tous deux de sa façon d'agir et de


a

Le corps, cette guenille, est-il d'une importance,
D'un prix à mériter seulement qu'on y pense?

Molière,

Les Femmes savantes

, acte II, scène VII.