<XXVII>1748, tourmentée par les intrigues de la comtesse de Burghauss, et réconciliée depuis deux ans avec le Roi, la Margrave invoqua son secours contre cette femme, et reconnut formellement les torts qu'elle avait eus envers son frère.a « Combien de fois, écrit-elle à Frédéric le 21 février 1748, combien de fois ne me suis-je pas reproché l'irrégularité de ma façon d'agir envers vous! Ma dernière maladie, une mort prochaine, ont augmenté mes réflexions. Un mûr examen sur moi-même m'a convaincue que dans tout le cours de ma vie je n'avais été coupable qu'à l'égard d'un frère que mille raisons devaient me rendre cher, et auquel mon cœur avait été lié depuis ma tendre jeunesse par l'amitié la plus parfaite et la plus indissoluble. Votre générosité vous a fait oublier mes fautes passées, mais ne m'empêche pas d'y penser à toutes les heures du jour. » La réponse de Frédéric (notre no 202) est un vrai monument de sa générosité. On voit que le franc aveu de la princesse suffit pour effacer de l'âme du monarque les dernières traces qu'un juste mécontentement y avait laissées; et la correspondance montre que, à partir de l'époque où cette lettre fut écrite, rien ne vint plus troubler les bons rapports entre la Margrave et son auguste frère, auquel elle témoigna dès lors un attachement à toute épreuve. Cependant elle conserva son ouvrage, même après l'éclatant exemple de piété filiale que Frédéric lui avait donné en publiant, en 1751, ses Mémoires de Brandebourg, où il parle de son père avec tout le respect et toute l'affection imaginables.
La princesse avait bien pressenti le scandale que causerait son livre, s'il voyait le jour. Elle dit, t. II, p. 268 : « J'écris pour me divertir, et ne compte pas que ces Mémoires seront jamais imprimés; peut-être même que j'en ferai un jour un sacrifice à Vulcain; peut-être les donnerai-je à ma fille; enfin je suis pyrrhonienne là-dessus. Je le répète encore, je n'écris que pour m'amuser, et je me fais un plaisir de ne rien cacher de tout ce qui m'est arrivé, pas même mes plus secrètes pensées. » Nous présumons que la Margrave, après avoir confié son ouvrage à M. de Superville, le perdit entièrement de vue. Il semble aussi qu'elle n'en ait fait aucune mention dans sa disposition testamentaire. En effet, on lit dans l'Éloge historique du marquis d'Adhémar que, après avoir reçu la
a Voyez ci-dessous, p. 194-196.