251. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH.
Ce 2 (février 1753).
Ma très-chère sœur,
J'ai été vivement touché du malheur qui vient de vous arriver; pourvu que la frayeur ne vous ait pas fait du tort à votre précieuse santé, je vois du remède au reste. Tout ce que votre cœur vous dit qu'il sentirait si j'étais dans votre cas, je l'éprouve en ce moment, la pitié, la tendresse, la compassion; enfin je sens pour votre infortune ce que peut-être je ne souffrirais pas pour moi-même. Mais, ma chère sœur, l'amitié ne doit point être stérile; c'est peu de plaindre ses amis, il les faut assister. Marquez-moi à cœur ouvert en quoi je puis vous être utile, et soyez persuadée que je ferai de mon mieux pour vous soulager. Écrivez-moi comme à un ami qui mérite quelque confiance; le chasseur pourra être de retour bien vite, et dès que j'aurai reçu votre lettre, je tâcherai de vous donner de mon mieux des marques de la sincère tendresse que j'ai pour vous. Je vous conjure de me donner en même temps des nouvelles de votre santé, qui aurait pu facilement souffrir de cette frayeur et de cette épouvante. Je vous jure que je suis aussi confus et consterné de votre affliction comme si cela m arrivait aujourd'hui; mais j'y vois jour, vous pouvez réparer avec un peu de temps toutes les pertes que vous avez faites. Il n'y a que le logement qui m'embarrasse; je vous offrirais volontiers ma maison; le malheur est qu'elle n'est pas proche de Baireuth. Adieu, ma chère sœur. Pour Dieu, conservez votre personne; cette perte serait irréparable, au lieu qu'il y a d'ailleurs remède à tout. Je suis avec la plus vive tendresse, ma très-chère sœur, etc.,