I. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC MARIE-DOROTHÉE, VEUVE DU MARGRAVE ALBERT DE BRANDEBOURG. (16 ET 20 AVRIL 1741.)[Titelblatt]
<2><3>1. A LA MARGRAVE ALBERT.
Quartier général d'Ohlau, 16 avril 1741.
Madame ma tante,
C'est avec une sensibilité extrême que je me vois obligé d'entretenir Votre Altesse sur le déplorable sujet de la mort inopinée du brave prince Frédéric son digne fils, qui vient de nous être enlevé dans la bataille de Mollwitz.2_3-a Je comprends une partie de la vivacité de votre douleur par celle que cette perte irréparable m'a causée; et plus j'ai connu et estimé ses belles et grandes qualités, plus je trouve de sujet de m'affliger avec V. A. d'un coup si fatal pour elle, pour moi et pour toute notre maison. Cependant vous agréerez, s'il vous plaît, que, en partageant votre juste tristesse, je l'envisage comme l'effet de la sainte volonté du suprême arbitre de la vie, en le suppliant de vouloir répandre sur le cœur accablé de V. A. ses consolations divines et efficaces, afin de la soutenir dans ces circonstances infortunées. Je ferai tout ce qui dépendra de moi pour vous convaincre de la sincérité de ma compassion, et de la parfaite amitié avec laquelle je suis,
Madame ma tante,
de Votre Altesse
le très-bon et très-fidèle cousin,
Federic.
2. DE LA MARGRAVE ALBERT.
Berlin, 20 avril 1741.
Sire,
S'il y a quelque chose au monde qui puisse arrêter le cours de mes larmes et me donner de la consolation, c'est sans doute la très-gracieuse part que Votre Majesté daigne prendre à la douloureuse perte que j'ai faite d'un fils que j'aimais tendrement. Ces marques des bontés royales que V. M. me témoigne dans cette occasion, jointes aux réflexions d'une entière résignation aux ordres de la Providence, m'engageront à modérer ma tristesse et à adorer ses arrêts impénétrables. C'est cette Providence que j'invoque aussi avec confiance pour la conservation de V. M. et pour tout ce qui peut combler ses désirs; et, pénétrée de la plus vive reconnaissance des hautes grâces et bienveillances de V. M., je la supplie de daigner me les continuer, de même qu'aux deux fils qui me restent, et d'être persuadée de la très-respectueuse soumission avec laquelle je suis,
Sire,
de Votre Majesté
la très-humble et très-obéissante servante,
Marie-Dorothée, M. d. B.
2_3-a Voyez t. II, p. 85, et t. XXVII. I, p. 113.