<324>s'est passé depuis sa mort. Il entendra avec étonnement comment les flottes russes ont été victorieuses en Archipel, l'humiliation de Mustapha, le Pont-Euxin chargé de vaisseaux de la grande Catherine, l'indépendance du kan des Tartares, puis la paix de Teschen dictée par cette même Impératrice, l'Océan rendu libre par ses lois, la Hollande protégée par sa générosité, et, en même temps que ces grandes entreprises se passent aux yeux de l'Europe attentive, la Russie, dans son intérieur, devenant de jour en jour plus florissante sons la sage administration de son auguste souveraine. Pourvu, madame, qu'après ma mort je ne conserve qu'un soupçon d'âme, V. M. I. peut être sûre que cet entretien aura lieu tel que j'ai l'honneur de le lui tracer; et supposé que l'empereur Pierre Ier doutât de mon récit, j'appellerais Marie-Thérèse et Mustapha même comme les témoins de ce que j'ai avancé. Aucun d'eux ne pourrait me donner un démenti; Thérèse même avouerait que, indépendamment de certains arrangements qu'elle avait pris avec Mustapha, elle avait été obligée de céder à l'ascendant vainqueur de la grande Catherine. Mais je ne sais où je m'égare; il était bien question de parler, en vieux radoteur, des morts et des champs Élysées à celle qui rend sa vie si mémorable par les actions les plus signalées. Pardonnez-moi, madame, cette faiblesse de vieillard. Mais mon âge ni rien au monde ne m'empêcheront d'être avec persévérance de l'attachement le plus inviolable et avec la plus haute considération,
Madame ma sœur,
de Votre Majesté Impériale
le fidèle frère, admirateur
et allié,
Federic.