<122>quand il est arrivé. Pour cela, 1o il faut mener avec soi du pain pour quelques jours; 2o il faut poursuivre l'ennemi quelques jours, surtout celui de la bataille; s'il ne peut trouver le moment de se recueillir, il fuira toujours plus loin; s'il fait même mine de s'arrêter quelque part, il faut le brusquer où il paraît vouloir faire ferme, ne point épargner les troupes alors, soit par des fatigues ou des attaques nouvelles, puisqu'il s'agit, par ces fatigues-là, de leur procurer par la suite un long repos. Chaque jour de poursuite diminuera l'armée ennemie de quelques milliers d'hommes, et bientôt il ne lui restera plus de corps assemblé, surtout si l'on fait tous les efforts possibles pour leur enlever le bagage. C'est par ces sortes d'actions que, dans peu de campagnes, on fait plus de chemin que d'autres généraux dans beaucoup d'années; mais cela n'est pas facile, car beaucoup d'officiers se tiennent quittes pour avoir fait leur devoir à la rigueur; la plupart sont si aises que la bataille soit finie, qu'on a bien de la peine à leur inspirer cette nouvelle ardeur de poursuivre. Il faut surtout bien choisir les officiers détachés pour hâter la fuite des ennemis, et prendre les meilleurs de tous; au défaut de quoi on réussirait aussi peu que le prince Eugène et Marlborough, qui, après la bataille de Malplaquet, détachèrent le général Bülow, des Hanovriens, qui se garda bien d'approcher de l'arrière-garde française, et ne la suivit qu'à six mille pas.
DES DISPOSITIONS DIFFÉRENTES D'ARMÉE.
Je ne parle point des dispositions différentes pour les passages de rivières, pour les retraites, pour les surprises d'armée, à cause que j'en ai parlé dans ma première partie; mais je recommande à tous ceux qui sont chargés d'en faire de penser surtout à garder leurs flancs et à fortifier l'infanterie par la cavalerie, celle-là par l'infanterie, l'une et l'autre par le canon, à joindre les secours de la fortification et des mines à ceux-là, et d'employer le tout selon les circonstances dans lesquelles ils se trouvent et selon le terrain dans lequel ils sont placés. Je ne parle point d'attaques de retranchements, à cause que ce n'est point l'usage de nos voisins